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Comptes rendus<br />
telle autre ? Cette branche de l'histoire du livre restitue toute leur importance<br />
à l'illustration (son agencement avec le texte), aux commentaires et<br />
notes, à la ponctuation, à la table des matières, au choix des citations, à la<br />
langue utilisée, au style, à la qualité du papier et de l'impression, bref au<br />
discours hors-texte, résumé dans les préfaces, les fanli f\ffl\ ou les dufa Uf<br />
fê. La question du ou des lectorats et celle de l'histoire de la lecture en<br />
Chine - et leurs implications pour l'éditeur en termes de « cible », de<br />
« segmentation » - sont extrêmement complexes, et y répondre implique<br />
une large part de spéculation. Il paraît indiscutable qu'il y avait des publics<br />
différenciés selon l'âge, le sexe et le niveau d'instruction. Mais la vulgarisation<br />
dans la diffusion des connaissances (comptines, formules mnémotechniques,<br />
images, passages soulignés, simplifiés, abrégés) n'a-t-elle pas<br />
contribué à effacer ces cloisonnements ? Comme le souligne McLaren, le<br />
lecteur semi-lettré se sent honoré d'avoir accès à une connaissance qui lui<br />
est en principe inintelligible. Mais dans le sens inverse, les ouvrages pour<br />
le « grand public » plaisent aussi à certains lettrés. La question du vernaculaire,<br />
que McLaren inclut dans son propos, est éminemment complexe. On<br />
sait que la langue vernaculaire n'était pas accessible à tous, bien au<br />
contraire. Mais à la fin des Ming naît l'idée que la littérature vernaculaire<br />
véhicule finalement le même message que les Classiques et qu'elle doit<br />
être utilisée pour rendre ce message accessible au plus grand nombre, à<br />
l'instar des traductions en baihua aujourd'hui.<br />
A. McLaren pose des questions essentielles pour quiconque chercherait<br />
à écrire une histoire de la lecture en Chine 6 . Elle commence par montrer<br />
comment les conceptions « classiques » de la lecture (la lecture quasi<br />
rituelle chez Zhu Xi) se démodent à mesure que le livre prend son essor au<br />
XVI e siècle et que son lecteur devient tout à la fois plus populaire, plus<br />
pragmatique, plus hédoniste, plus « paresseux » aussi. Elle attire<br />
l'attention sur l'émergence - nettement visible dans les préfaces des œuvres<br />
de fiction - d'un lexique particulier de la lecture à partir de cette date,<br />
s'attardant sur plusieurs termes désignant autant de catégories de lecteurs<br />
ou de lectrices (gendered reading). Par exemple, le terme haoshizhe #?(§•<br />
^f, que Clunas a discuté dans le domaine des arts, perd sa connotation<br />
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