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COMPTES RENDUS - AFEC

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Comptes rendus<br />

l'auteur d'ajouter deux remarques qui, pour être banales, ne perdent rien à<br />

être répétées. Première remarque : dans la littérature de gauche des années<br />

1920 et 1930, les écrivains placent dans la bouche de leurs héros villageois<br />

des assertions (concernant, par exemple, les causes de leur misère) qui<br />

sont celles-là même que les intellectuels ont conçues en ville. Seconde<br />

remarque : c'est le nationalisme des intellectuels qui les conduit à<br />

s'intéresser aux masses paysannes, à la fois boulet (si on ne les transforme<br />

pas, on ne peut pas sauver la Chine) et atout (grâce à leur nombre et leur<br />

misère, qui fait d'eux des révolutionnaires potentiels). Quand le malheureux<br />

Hu Shi énumère benoîtement cinq fléaux à éradiquer (pauvreté, maladie,<br />

ignorance, corruption et désordre) et ajoute que ces maux internes à<br />

la Chine existaient avant l'arrivée des impérialistes, tout le monde lui<br />

tombe dessus : les communistes et la gauche bien sûr, mais même un fieffé<br />

conservateur comme Liang Shuming.<br />

Du potentiel révolutionnaire prêté aux paysans on passe tout naturellement<br />

à la quatrième et dernière épithète, mais le discours sur la puissance<br />

paysanne s'accompagne de son inévitable contrepartie :<br />

l'impuissance des paysans laissés à eux-mêmes. Ce qui leur manque (organisation<br />

et conscience politique), c'est à « nous », intellectuels nationalistes,<br />

à le leur insuffler de l'extérieur, quitte à réviser nos schémas antérieurs.<br />

Chen Duxiu, qui avait dénoncé en 1918 la xénophobie, la superstition<br />

et la barbarie des Boxeurs, fait plus que les absoudre six ans plus tard<br />

(les crimes des impérialistes ont provoqué leur juste riposte), il érige leur<br />

rébellion en solennel prélude à la révolution nationale chinoise. En 1927,<br />

le même Chen, contraint il est vrai par les directives du Komintern, ne<br />

mettra pas moins ses camarades en garde contre les «excès » paysans,<br />

suscitant du même coup les sarcasmes de Mao. Ce dernier élève, on le sait,<br />

au statut de mythe fondateur l'agitation déclenchée dans les campagnes<br />

par l'avance de la Beifa. Il suscite nombre d'émulés : à la suite de cet<br />

épisode inespéré, la mode est de prêter une conscience révolutionnaire aux<br />

paysans, aux jeunes surtout, mais leur modèle (ou leur exécution) finit par<br />

convaincre leurs pères, originellement soumis, superstitieux et fatalistes.<br />

Désormais, c'est la lucidité de Lu Xun qui dérange : en 1928, un critique<br />

littéraire de gauche dont nous n'avons aucun besoin de retenir le nom<br />

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