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Langue, langage et parole en éducation - Université François ...

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49Probablem<strong>en</strong>t avons-nous <strong>en</strong> mémoire ces hordes de m<strong>en</strong>diants difformes dont on nous aconté l’exist<strong>en</strong>ce, ces gueux que l’on croisait au coin des rues sombres ou ces monstres quel’on exhibait sur les foires. Toute c<strong>et</strong>te cour des miracles nous habite <strong>en</strong>core, relayée par lesimages virtuelles que l’on a construites. Au-delà du corps mutilé, nous voyons se profiler lapauvr<strong>et</strong>é, la solitude, la mort dis<strong>en</strong>t certains auteurs. A bi<strong>en</strong> réfléchir, plus que la mort on yvoit aussi l’image de ce que nous serons demain, l’allégorie de la vieillesse. Nul ne songeraità se moquer d’une personne âgée <strong>en</strong> difficulté, le grand âge n’a pas à rougir de seshandicaps, c’est l’homme immature qui <strong>en</strong> craint la confrontation. Cela ne nous semble pasdans l’ordre des choses de voir un de nos semblables afficher une telle différ<strong>en</strong>ce sansscrupule ni de l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre rev<strong>en</strong>diquer un droit d’équité id<strong>en</strong>titaire.Pourtant, au fil des âges, des civilisations <strong>et</strong> des cultures le handicap, qui ne portait pas<strong>en</strong>core son nom, s’est prés<strong>en</strong>té sous d’autres aspects. La mythologie possède sa cohorte dedieux prés<strong>en</strong>tant des difformités notoires qui ne les déchoi<strong>en</strong>t pas pour autant de leur statut.Dans l’hindouisme, si la caste vous stigmatise, le handicap, lui, est une bénédiction. Dans lespeuples d’Afrique c<strong>en</strong>trale, une personne handicapée a sa place, on la croit douée de pouvoirsurnaturel <strong>et</strong> l’on <strong>en</strong> vi<strong>en</strong>t à craindre son mécont<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t. En Occid<strong>en</strong>t, l’<strong>en</strong>fant néhandicapé n’avait pas le beau rôle, exposé sur la place publique à Athènes comme à Rome,ses chances de survie étai<strong>en</strong>t minces. En France, mais probablem<strong>en</strong>t ailleurs de par lemonde, le handicapé inné était excusable si l’on était bi<strong>en</strong> né. L’histoire de France nemanque pas de barons ou autres nobles aux corps imparfaits qui trouvai<strong>en</strong>t jolies femmes <strong>et</strong>m<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t grande vie, tant que leur escarcelle était bi<strong>en</strong> remplie. Acquis au combat, lehandicap était synonyme de bravoure, on se pressait pour saluer ces valeureux soldats.Mais que le handicap frappe un pauvre <strong>et</strong> la sanction tombait, sans possibilité de travail ni derev<strong>en</strong>us, il pr<strong>en</strong>ait le chemin de l’exclusion. Nous n’avons pas non plus oublié que des lieuxleur étai<strong>en</strong>t destinés, indig<strong>en</strong>ts <strong>et</strong> infirmes sous le même toit, <strong>et</strong> les faibles d’esprit cloitrésloin du regard (Foucault, 1972). Tout cela <strong>en</strong>combre notre mémoire. Même si le temps avoilé les images, si notre fort intérieur nous <strong>en</strong>joint d’oublier pour construire une autreréalité, nous sommes tributaires du passé. Les représ<strong>en</strong>tations ancestrales ont <strong>en</strong>core droit decité <strong>et</strong> si nous avons parlé à l’imparfait par <strong>en</strong>droit, le prés<strong>en</strong>t aurait tout aussi bi<strong>en</strong> conv<strong>en</strong>u.Que perçoit la personne atteinte d’un handicap confrontée à ses contemporains ? Le miroirest à deux faces, si le premier rej<strong>et</strong>te l’image du second, il lui r<strong>en</strong>voie aussi ses craintes, sesdoutes qui se convertiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> autant de messages d’incompréh<strong>en</strong>sion <strong>et</strong> de rej<strong>et</strong> pour lapersonne qui les reçoit. Le refl<strong>et</strong> est déformé, dans le regard d‘autrui on ne se reconnait pas.

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