Le Merblex

manque de vocabulaire qui le révulsait le plus, au moment où il
devait purger son cœur.
Depuis l’incident, Clara évitait de croiser nos regards.
Même le sien reflété dans les glaces lui adressait des reproches.
Elle vivait dans une espèce d’état de semi-prostration permanente
qui la dépersonnalisait. Puis, un jour… suite à une révolte
du personnel aux postes de dépannages, et qui avait mal tourné,
la Bouche se réveilla. Elle me poursuivit armée d’un couteau à
viande. On a crapahuté dix bonnes minutes dans toute la casbah
avant qu’elle ne m’agrippe. Là, ça rigolait plus, sa langue piquait
à nouveau comme celle du serpent. Quand elle parvint à me
choper, elle me prit à la gorge, me colla au mur d’une main,
tandis que de l’autre elle pointait son couteau vers mon œil valide
:
« Si tu refuses encore de me dépanner, je te crève l’autre
t’as compris ! ? Sale Merblex ! »
Mais, mon nom ne figurait pas parmi ceux en qui se produit
l’obscurité. Elle me creva seulement le cœur. Quand les
choses n’allaient pas aussi loin, elle se contentait de me cracher
au visage pour soulager ses ires. J’avais plus qu’à courir au robinet,
tant son venin était acide et s’emparait de ma chair.
« Quand je pense à la vie que j’ai à cause de toi, tu devrais
avoir honte, je te renie salaud ! pftchü ! »
Mais j’étais l’enfant d’un dieu qui a beaucoup de formes et
dont le nom est caché, afin qu’aucune sorcière n’ait pouvoir sur
mon cœur. Ainsi, je me transformais à chaque fois qu’elle
croyait m’atteindre.
Une nouvelle fois, la peste de l’amour s’infiltrait chez nous,
avec ses relents de haine en lambeaux, sa syntaxe glaireuse et
ses larmes pathétiques. Mon cœur voltigeait au milieu d’eux,
avec des cris perçants comme ceux d’un faucon, pour les prévenir
du courroux qu’ils allaient joliment déclencher parmi les divinités.
Mais ils ne voulaient pas renoncer à la lutte. Nous igno-
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