Le Merblex

IX
Nous allions changer de mastaba. On avait proposé à Clara
d’aller remonter le chiffre d’affaire d’un dépôt de teinturerie en
perte d’altitude. Prouver qu’elle pouvait « s’en sortir » en
s’immergeant dans un formidable foutoir était exactement le
genre de défit qu’elle adorait. Elle n’attendait que ça pour revivre.
Un dimanche après-midi, la tribu partit en mission de reconnaissance
discrète.
« Voilà, c’est là, fit Clara en crochetant du doigt la devanture
d’un magasin : c’est ici.
– Tu es sûre ? questionna Léopold à voix basse, la tête rabotée
entre les épaules.
– Oui, certaine, au 13, c’est ce qu’ils m’ont dit.
– Ca n’a pas l’air d’une teinturerie ça, s’étonnait Léo’.
– Qu’est-ce que tu connais du commerce toi !
– Whouwhouwhouwhou ! « L’AIGLE NOIR » !
s’exclamèrent le Merblex et Zette en lisant l’enseigne de vitrine.
– Hep, du calme les Indiens, hein ! On n’y est pas encore à
« L’AIGLE NOIR »… »
La devise de la ville était : « Vert et Vieux », ce que la réalité
ne démentait pas. C’était une ville charcutée, endormie sous
les exhalaisons de gueuze et saupoudrée au pollen des chrysanthèmes
que les familles de Ménapiens portaient aux zombies de
la Toussaint… une vraie réserve d’Occidentaux en phase terminale
! Et c’était là qu’on allait vivre ! Au milieu des pensionnés
marqués du caducée, traînant la savate sous le ciel décloué ; vé-
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