Le Merblex

XXIII
Vers la fin de l’après-midi, F. Khasnoûb me chargea sur son
scooter et nous partîmes vers Gizeh. Atoum descendait dans le
ciel pourpre et les rares Occidentaux s’attardant encore sur le
plateau, n’allaient pas tarder à regagner leurs hôtels. Un Égyptien
en uniforme vint au devant de nous et fit signe de le suivre.
Lorsque nous fûmes à l’abri des regards, Farid me fit ôter ma
galabieh puis, il entreprit de m’asperger le corps avec l’eau du
bidon qu’il avait emporté.
« Nous allons entrer dans la Maison-de-Vie, nous devons
être purifiés, me dit-il en s’exécutant lui aussi. Il me mit une
couverture sur les épaules et me conduisit à la grille fermant
l’entrée de Kheops où l’homme en uniforme nous attendait avec
des torches. »
Nous entrâmes dans la pyramide par la brèche que les pilleurs
de tombes y avaient pratiquée quelques siècles plus tôt. La
grille grinça sur ses gonds en se refermant sur le monde matériel.
Farid Khasnoûb me devançait en éclairant l’étroit couloir
qui s’enfonçait sous la base de l’édifice. L’air toxique de ce vagin
antique dégageait une odeur âcre et croupissante. Au fond de
cette descente, la place était une sorte de caverne grossièrement
taillée dans le roc, dont seul le plafond traçait des angles rectilignes.
On pouvait y voir une fresque représentant des hommes
se poursuivant pour se fendre le crâne à coups de hache ; le
monde à l’envers ! Farid s’assit, éteignit sa torche et je l’imitai.
« Qui n’a connu que la nuit n’a pas goûté aux véritables ténèbres
de la duat, dit-il. »
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