Le Merblex

Ca n’est pas moi qui lui aurais donné tort, parce qu’il faut
trois jours pour que les énergies du corps se transfèrent de
l’autre coté et constituent entièrement l’œuf cosmique des marcheurs
sans pieds. Si on leur fauche un truc, ça leur manque
après et ils sont infirmes.
À la maison, ils avaient poussé la table contre un mur de la
salle à manger, afin que l’on puisse installer mon sarcophage.
Puis, dépassés par le cadre, Phyl’et Léo’se sont assis, suffoquant.
Ils sont restés sans broncher, comme prisonniers du silence,
tandis que Clara cuisinait. Au bout d’un moment, Philippe éclata
d’un rire qui libère la tête.
« Maintenant, il est tranquille le Merblex, dit-il, en montrant
le cercueil posé sur ses tréteaux…
– Vous venez à table, suppliait Clara de la cuisine…
– Oui, on arrive lança Léopold, puis il se mit à sangloter.
– Tu t’rends compte, continua Phyl’, tu t’rends compte que
l’égyptologue est dans cette boîte ? Y va pouvoir en faire, des
fouilles, maintenant…
– Oui, et pendant ce temps là, ta mère creuse à côté, fit
Léopold, puis ils partirent d’un rire sardonique.
– Tu crois que l’œil d’Horus nous voit ? questionna Phyl’en
pointant le plafond de l’index.
– On dit que les morts restent à côté de leur corps un bon
moment avant de s’en aller, répondit Léopold. Puis, il se leva,
quitta la pièce, pour revenir peu après, avec des pots de peintures.
– Tiens dit-il, en donnant à Philippe un pinceau, ça va lui
faire plaisir. Et, ils se mirent tous les deux à dessiner les yeux
d’Horus sur mon cercueil, qui bientôt fut décoré, comme un vrai
sarco’.
– 309 –