Le Merblex

VI
À l’enseigne du « Service Express », pour remonter
l’affaire, Clara avait décidé de créer une quinzaine commerciale.
Nettoyage à sec de deux vêtements pour le prix d’un ! Les Occidentaux
affluaient des quatre coins de la commune avec leurs
hardes, pans de loques, hauts-de-chausses, clicotes et guenilles
de toutes sortes. Nos affaires prospérèrent si bien qu’en deux
temps trois mouvements, nous avons essoré la clientèle du
« Tip-Top » qui tenait son comptoir un peu plus haut dans la
rue. Ad Augusta per angusta ! Elle nous regardait de travers la
dinde du « Tip-Top » ! Quant à ses parents qui n’étouffaient pas
de simplicité, ils venaient laver à grandes eaux leur Opel juste
sous nos vitrines, manière de protester contre l’hégémonie que
nous exercions désormais dans le quartier en matière de linge
sale. Après de longues équations, la Bouche consentit à ce que
papa achète un scooter.
Désormais Léopold se caillerait plus les meules en attendant
le tram comme il le faisait tous les matins pour aller bosser
et en plus, il pourrait aller à la pêche. De nature frileuse, Clara
ne l’accompagnerait que lorsqu’il ferait torride, ça c’était clair.
Pendant ce temps, mon frère et moi, nous nous étions lancés
dans l’exploration des forêts inexplorées de la Vecquée. C’est
là que nous guettaient les Tchicohïs, toujours embusqués pour
nous lancer des pierres. Mais nous avions le sens du territoire
bien ancré et nous étions décidés à les poursuivre jusqu’à ce
qu’ils les aient « suspendues aux branches » comme des paires
de cerises, qu’on disait. Ainsi commença la guerre de la Vecquée.
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