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Le Merblex

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n’avaient pas d’autre occupation que celle de s’attarder aux terrasses,<br />

devant un fanta, un thé à la menthe ou un pur Ceylan. À<br />

une table, on lisait le Times, à une autre, France Soir, Stern ou<br />

Life Magazine. Des cireurs crapahutaient d’une bottine à l’autre,<br />

des colporteurs proposaient des marchandises de contrebande,<br />

des photos pornos ou du hachisch.<br />

Il régnait à Tanger une atmosphère étrange, ceux que l’on y<br />

rencontrait n’avaient pas l’air de vacanciers, ils semblaient plutôt<br />

avoir changé d’identité pour s’installer dans une sorte de<br />

dolce farniente en attendant leur part du hold-up du siècle. Des<br />

bateaux aux ventres creux et rouillés hantaient les docks depuis<br />

trop longtemps semblait-il, pour qu’ils puissent encore reprendre<br />

la mer. Qu’étaient devenus leurs capitaines ? Dans cette<br />

ambiance insolite où le monde entier était au coude à coude, le<br />

sentiment du plus parfait incognito se mêlait à la sensation<br />

d’être épié, ce qui augmentait encore le charme du printemps<br />

marocain.<br />

À l’escale d’Alger, la « nonne joyeuse » débarqua et Mathéoni<br />

put prouver qu’il était parvenu à ses fins, en faisant circuler<br />

une photographie qu’il avait prise lui-même. La photo représentait<br />

la nonne en tenue d’Ève, coiffée seulement de sa cornette.<br />

Fallait l’entendre raconter combien de cierges ils avaient<br />

brûlé ensemble. Ils n’en pouvaient plus les autres, ça les faisait<br />

bander le sacrilège.<br />

À Alger, je pris le tour de garde de Mathéo qui devait se<br />

rendre à l’intérieur du pays, pour affaire… Il me rendrait le<br />

même service à l’escale d’Alexandrie, ce qui me permettrait<br />

d’aller au Caire.<br />

L’Égypte n’était plus qu’à trois jours, lorsqu’un mémorable<br />

mal de mer me prit. La vue d’un simple quignon de pain me faisait<br />

gerber comme un mort. On pouvait me suivre à la trace…<br />

J’avais le gésier révulsé à force et je maigrissais à vue d’œil. Certains<br />

marins avouaient cracher leurs tripes à chaque traversée,<br />

mais ça ne les empêchait pas de rempiler pour se barrer au bout<br />

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