Le Merblex

J’lui ai raconté alors, à Farid mon film des familles… avec
Grosse Nasse, la Bouche, Rinkin, C’Quiveut et les autres… la totale.
Lorsque j’eus terminé, je lui demandai s’il me croyait et il
me répondit :
« Un enfant heureux n’aurait pu inventer tout ça. Tu es
comme ces cactus du désert, couverts d’épines, pour protéger la
chair tendre qu’ils ont à l’intérieur. Je t’enseigne le sourire Henri
: le sourire est une ouverture sur le divin. Il élève la matière
en faisant remonter le visage. Le sourire est la ligne de l’horizon.
Ton horizon. Et si tu veux y entrer, tu dois lâcher le poids de
l’habituel bonheur.
– Elle a dit que je ne saurai jamais sourire… Pendant des
années, j’ai pensé qu’à mes lèvres d’ailleurs, qu’en toutes circonstances
je m’évertuais à maintenir tendues d’une commissure
à l’autre… je voulais pas qu’elles retombent, pour pas qu’on
voit le poids que je portais… Sourire, c’est pas que je voulais pas,
seulement je pouvais pas faire deux choses à la fois…
– À certains hommes, le sourire coûte deux fois plus, mais
quand ceux-là sourient, ils s’élèvent deux fois plus haut. Maintenant,
va là-bas et soulage ta vessie… Écoute ce que je dis, je
connais…
– « § » »
Je fis quelques pas dans la direction qu’il m’indiquait, peu
convaincu de la nécessité de la chose. Je revins chancelant, sans
avoir suivi ses conseils, n’ayant pas pour habitude de faire fonctionner
mon organisme sur commande. Nous nous éloignâmes
de la natte et Farid traça un cercle dans le sable, autour de moi.
Il me banda les yeux m’ordonna de ne pas quitter le centre de
cette circonférence puis, j’attendis la suite des événements.
Le bourdonnement lointain du Caire, qu’amenait jusqu’à
nous le vent du désert, pénétrait en moi, manifestant le passé à
gros bouillons. Je m’agrippais aux grains du comboloï que mon
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