Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge
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© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit<br />
LA NÉVROSE TRAUMATIQUE DÉCLENCHÉE 89<br />
bi<strong>en</strong> compte, ils développ<strong>en</strong>t vis-à-vis du « monde des vivants » une<br />
agressivité que certains ne parvi<strong>en</strong>dront plus à maîtriser.<br />
CONCLUSION<br />
On doit probablem<strong>en</strong>t à Kraepelin la meilleure dénomination de c<strong>et</strong><br />
état post-traumatique comme « névrose d’effroi ». L’effroi, au mom<strong>en</strong>t<br />
de l’accid<strong>en</strong>t d’abord, puis itérativem<strong>en</strong>t lors des manifestations du<br />
syndrome de répétition, révèle au suj<strong>et</strong> qu’il est construit autour de ri<strong>en</strong><br />
(Lacan, 1986). Et il l’objectivise chaque fois un peu plus comme « reste<br />
chu »du monde des êtres parlants.<br />
Toutefois, c<strong>et</strong>te « rupture communautaire » (Barrois, 1998) n’est pas<br />
<strong>en</strong> soi irrémédiable. Toujours possible, le r<strong>en</strong>ouvellem<strong>en</strong>t de l’alliance<br />
fraternelle se fera par le paiem<strong>en</strong>t d’une d<strong>et</strong>te. C’est une opération<br />
longue <strong>et</strong> compliquée mais que chacun a déjà effectuée une fois, lors de<br />
son <strong>en</strong>trée dans le langage, du passage du néant à la castration. Il faut<br />
du courage pour la r<strong>en</strong>ouveler, quand le statut de victime t<strong>en</strong>d à faire<br />
de celle-ci « une personne débarrassée de ses d<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> de ses devoirs <strong>et</strong><br />
ayant de façon infinie des droits sur <strong>les</strong> autres » (Lebigot, 1999).<br />
Le trauma installe chez le suj<strong>et</strong> un espace de néant d’où la parole s’est<br />
abs<strong>en</strong>tée. C’est la pulsion de mort qui vi<strong>en</strong>t y régner, soit dans un surgissem<strong>en</strong>t<br />
qui s’empare de tout l’appareil psychique, soit <strong>en</strong> dessinant une<br />
prés<strong>en</strong>ce, celle d’un « dieu obscur » (Lacan, 1973) persécuteur. Dans <strong>les</strong><br />
deux cas, il est urg<strong>en</strong>t que des mots vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t recoloniser c<strong>et</strong> espace dans<br />
le transfert, c’est-à-dire portés par une parole adressée à l’Autre. Parmi<br />
nos pati<strong>en</strong>ts prés<strong>en</strong>tant une névrose traumatique ce sont ceux qui s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t<br />
arriver le drame qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t le plus facilem<strong>en</strong>t consulter. Cliniquem<strong>en</strong>t,<br />
ils form<strong>en</strong>t deux groupes différ<strong>en</strong>ts, <strong>et</strong> il ne faudra pas s’étonner de voir,<br />
chez <strong>les</strong> premiers que nous avons décrits, le travail préalable qui devra<br />
être accompli avant d’atteindre le symptôme. Reste la question de savoir<br />
pourquoi chez eux une pulsion homicide atteint une telle force dans la<br />
répétition. La réponse est chez chacun, dans son histoire <strong>et</strong> dans <strong>les</strong><br />
particularités de sa r<strong>en</strong>contre avec l’événem<strong>en</strong>t. On peut seulem<strong>en</strong>t dire<br />
que, dans tous <strong>les</strong> cas, l’« illusion » qui s’est effondrée ne porte pas<br />
seulem<strong>en</strong>t sur la mort ou la stabilité du monde, mais sur la « nature »<br />
de l’homme (y compris eux-mêmes) profondém<strong>en</strong>t <strong>et</strong> ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t<br />
voué au mal.