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Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge

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110 CLINIQUE<br />

Le corps médical <strong>et</strong> la « victimologie »<br />

Chacun peut maint<strong>en</strong>ant le constater, il est dev<strong>en</strong>u habituel que <strong>les</strong><br />

médias signal<strong>en</strong>t, à propos d’une catastrophe, l’interv<strong>en</strong>tion de psychiatres<br />

<strong>et</strong> de psychologues. Ils considèr<strong>en</strong>t comme acquis que tout<br />

traumatisé peut trouver un interlocuteur spécialisé.<br />

Or il n’<strong>en</strong> est ri<strong>en</strong> (Lebigot, 1998). Les psychiatres ont été touchés<br />

par l’émerg<strong>en</strong>ce de ce qu’il est conv<strong>en</strong>u d’appeler la « victimologie »<br />

<strong>en</strong> même temps que le public. Ni leurs études, ni <strong>les</strong> revues ou traités<br />

qu’ils lis<strong>en</strong>t ne <strong>les</strong> ont préparés, dans l’<strong>en</strong>semble, à aborder ce type de<br />

pati<strong>en</strong>ts. Aucune étude n’a <strong>en</strong>core mesuré ce phénomène pourtant très<br />

perceptible pour qui travaille dans ce champ : la plupart des premières<br />

r<strong>en</strong>contres psychiatre-névrosé traumatique sont des r<strong>en</strong>contres ratées.<br />

El<strong>les</strong> laiss<strong>en</strong>t <strong>les</strong> pati<strong>en</strong>ts dans un désarroi plus grand <strong>en</strong>core que celui<br />

qui avait déterminé la consultation. Il faut savoir aussi que de plus <strong>en</strong><br />

plus souv<strong>en</strong>t <strong>les</strong> préf<strong>et</strong>s désign<strong>en</strong>t des psychiatres pour interv<strong>en</strong>ir dans<br />

des situations de drames collectifs, sans que ceux-ci y soi<strong>en</strong>t le moins<br />

du monde préparés.<br />

Mais la profession réagit vite. Depuis deux ans, <strong>les</strong> lieux d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

de la « victimologie », terme bi<strong>en</strong> mal choisi, se multipli<strong>en</strong>t.<br />

La formation médicale continue, à Paris <strong>et</strong> <strong>en</strong> province, privilégie ce<br />

domaine <strong>et</strong> organise des sessions avec des quotas maximums de participants<br />

à chaque fois. Heureusem<strong>en</strong>t il faut peu de chose pour faire d’un<br />

psychiatre consci<strong>en</strong>cieux un bon « victimologue ». Reste à informer<br />

<strong>les</strong> médecins généralistes <strong>et</strong> <strong>les</strong> chirurgi<strong>en</strong>s, premiers interlocuteurs de<br />

ces pati<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> particulier dans <strong>les</strong> cas d’agression, de viol, d’accid<strong>en</strong>ts<br />

domestiques, de la circulation ou du travail, <strong>et</strong>c.<br />

Conclusion<br />

Les médias sont le refl<strong>et</strong> de la société qu’ils ont la tâche d’informer<br />

<strong>et</strong> de divertir. La brutalité de leurs interv<strong>en</strong>tions sur le terrain des<br />

catastrophes dit quelque chose des att<strong>en</strong>tes d’un public formellem<strong>en</strong>t<br />

policé. Images <strong>et</strong> comm<strong>en</strong>taires, sous couvert de produire de l’information,<br />

vis<strong>en</strong>t d’abord à fabriquer de la jouissance. Les pati<strong>en</strong>ts <strong>en</strong><br />

proie au traumatisme ne s’y tromp<strong>en</strong>t pas : derrière la réalité qui leur est<br />

montrée, ils perçoiv<strong>en</strong>t que ce qui est traqué c’est le réel. Ils perçoiv<strong>en</strong>t<br />

moins bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> revanche que ce qu’il s’agit de cacher, c’est la part que<br />

pr<strong>en</strong>d chacun au désordre du monde. Or la voie de la guérison nécessite<br />

de s’ouvrir à nouveau à ce que Paul Ricœur nomme « la culpabilité<br />

métaphysique » (De Solemne, 1998). En d’autres termes, se reconnaître<br />

un parmi <strong>les</strong> autres. Les images r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t <strong>les</strong> victimes à leur cauchemar,

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