Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge
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196 THÉRAPEUTIQUE<br />
Le p<strong>et</strong>it mur réapparaît dans deux rêves. Dans l’un, elle est avec Saïd,<br />
il est souriant, ils jou<strong>en</strong>t au t<strong>en</strong>nis. Dans l’autre, ils sont <strong>en</strong>core <strong>en</strong>semble<br />
<strong>et</strong> elle a la s<strong>en</strong>sation que le mur la protège.<br />
La période qui suit est étrange. Pour la première fois depuis longtemps,<br />
elle se s<strong>en</strong>t <strong>en</strong>jouée, très efficace dans son travail <strong>et</strong> ses études.<br />
En revanche ses nuits sont peuplées de cauchemars où elle subit des<br />
châtim<strong>en</strong>ts sanglants : main coupée, tête tranchée, <strong>et</strong>c. Deux événem<strong>en</strong>ts<br />
survi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t coup sur coup qui vont précipiter <strong>les</strong> choses. Elle<br />
est victime d’un att<strong>en</strong>tat à la pudeur de la part de son employeur, qui la<br />
coince dans son bureau <strong>et</strong> se masturbe devant elle. Les revivisc<strong>en</strong>ces<br />
diurnes de l’att<strong>en</strong>tat réapparaiss<strong>en</strong>t. Elle fait un cauchemar où des<br />
terroristes l’emmèn<strong>en</strong>t <strong>en</strong> bateau avec sa mère <strong>et</strong> où el<strong>les</strong> sont coupées<br />
<strong>en</strong> morceaux. « J’ai perdu l’espoir de m’<strong>en</strong> sortir », comm<strong>en</strong>te-t-elle.<br />
Mais peu après, nous sommes <strong>en</strong> juin 1998, elle touche <strong>en</strong>fin une forte<br />
somme du Fonds de Garantie. Leila fait alors c<strong>et</strong>te remarque :<br />
« Ma vie ça a été jusqu’ici comme s’il ne fallait pas que de bonnes<br />
choses m’arriv<strong>en</strong>t. »<br />
C<strong>et</strong> arg<strong>en</strong>t lui perm<strong>et</strong> d’aller à Londres voir ses deux frères aînés,<br />
militants islamistes très actifs. Ni l’un ni l’autre ne respir<strong>en</strong>t la joie<br />
de vivre, ils macèr<strong>en</strong>t dans leur idéologie « complètem<strong>en</strong>t fascinés par<br />
l’horreur ». C<strong>et</strong>te r<strong>en</strong>contre lui a appris quelque chose sur elle-même :<br />
« J’ai choisi la voie du martyre <strong>et</strong> je me r<strong>en</strong>ds compte que ça ne<br />
m<strong>en</strong>ait nulle part. »<br />
Affirmation <strong>en</strong> fait très énigmatique, qui inaugure une période où elle<br />
s’interroge sur ses s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts de culpabilité. Elle m<strong>et</strong> <strong>en</strong> cause d’abord<br />
l’extrême ambival<strong>en</strong>ce de sa mère à son égard, sa haine parfois clairem<strong>en</strong>t<br />
énoncée, mais un rêve la lance sur une autre piste. Il comm<strong>en</strong>ce<br />
avec le « p<strong>et</strong>it mur » <strong>et</strong> la suite est trop floue pour pouvoir faire l’obj<strong>et</strong><br />
d’un récit, mais il amène ce comm<strong>en</strong>taire :<br />
« Je m’aperçois qu’avec <strong>les</strong> hommes, je me comporte comme une<br />
p<strong>et</strong>ite fille avec son père. »<br />
Dans un lapsus qui ne lui échappe pas, elle se situe comme la fille<br />
de son père <strong>et</strong> de sa grand-mère paternelle (à laquelle elle est c<strong>en</strong>sée<br />
ressembler). S’<strong>en</strong>suit une période de désarroi qui, pour la première fois,<br />
affecte même ses études.<br />
La crise s’estompe avec c<strong>et</strong>te parole au début d’un <strong>en</strong>tr<strong>et</strong>i<strong>en</strong> :<br />
« C’est la première fois dans ma vie que je peux dire que je me s<strong>en</strong>s<br />
libre. »<br />
Puis :