Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge
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190 THÉRAPEUTIQUE<br />
attaqués, un camarade est b<strong>les</strong>sé. Il a oublié sa trousse d’urg<strong>en</strong>ce. Les<br />
autres l’accabl<strong>en</strong>t <strong>et</strong> il se s<strong>en</strong>t très <strong>en</strong> faute. Il se relève de dessus le<br />
b<strong>les</strong>sé <strong>et</strong> reçoit une balle <strong>en</strong> plein front.<br />
L’alcool paternel<br />
Piotr est à l’hôpital depuis un mois <strong>et</strong> demi. Le délire a fini par<br />
disparaître <strong>et</strong> la dépression est moins accablante. À nouveau, il fait un<br />
cauchemar qui transpose l’événem<strong>en</strong>t traumatique : il revi<strong>en</strong>t à Djibouti<br />
<strong>en</strong> avion. La police militaire l’att<strong>en</strong>d sur l’aéroport <strong>et</strong> l’amène m<strong>en</strong>otté<br />
à l’unité où il comparait devant le capitaine <strong>et</strong> le lieut<strong>en</strong>ant. Ils lui dis<strong>en</strong>t<br />
qu’il n’est qu’un alcoolique <strong>et</strong> le puniss<strong>en</strong>t de quarante jours d’arrêt.<br />
Être traité d’alcoolique lui est insupportable. Il raconte deux souv<strong>en</strong>irs.<br />
L’un, il a moins de trois ans. Son père est ivre. Sa mère appelle la<br />
police qui lui passe <strong>les</strong> m<strong>en</strong>ottes <strong>et</strong> l’embarque. C’est c<strong>et</strong>te scène qui est<br />
re<strong>prise</strong> dans le cauchemar, où le fils pr<strong>en</strong>d la place du père.<br />
Dans l’autre souv<strong>en</strong>ir ses par<strong>en</strong>ts sont déjà séparés. Son père, ivre<br />
<strong>en</strong>core, annonce sa v<strong>en</strong>ue. Sa mère <strong>en</strong>voie l’<strong>en</strong>fant chez des voisins<br />
pour qu’ils téléphon<strong>en</strong>t à la police. Au r<strong>et</strong>our, il croise son père dans<br />
le couloir. Sa mère refuse de lui ouvrir la porte de l’appartem<strong>en</strong>t. Son<br />
père lève la main sur lui mais n’achève pas son geste :<br />
« C’est toi qui es allé prév<strong>en</strong>ir la police, mais je ne peux pas frapper<br />
mon fils. »<br />
En rep<strong>en</strong>sant à c<strong>et</strong> épisode, quelques années plus tard, il a p<strong>en</strong>sé qu’il<br />
avait été un « Juda ».<br />
Ce souv<strong>en</strong>ir ramène Piotr à l’« accid<strong>en</strong>t ».<br />
Quand le lieut<strong>en</strong>ant l’a traité d’alcoolique <strong>et</strong> de bon à ri<strong>en</strong>, « ça m’a<br />
mis dans un état second, ça a tout bloqué dans ma tête, j’ai p<strong>en</strong>sé à<br />
mon père <strong>et</strong> à ces légionnaires alcooliques <strong>et</strong> je n’ai ri<strong>en</strong> répondu. Je<br />
me demande maint<strong>en</strong>ant pourquoi je ne me suis pas déf<strong>en</strong>du, parce que<br />
si j’avais protesté ri<strong>en</strong> de ce qui s’est passé ne serait arrivé. Je porterai<br />
toute ma vie ce poids de l’alcool comme un fardeau. »<br />
Le poids de la faute<br />
Son beau-père battait souv<strong>en</strong>t le suj<strong>et</strong>, <strong>et</strong> avec une grande viol<strong>en</strong>ce.<br />
Il était d’ailleurs ce qu’on pourrait appeler un sale gosse. Un jour il est<br />
saisi d’une haine subite à l’égard de l’aîné de ses demi-frères <strong>et</strong> le frappe<br />
comme s’il voulait le tuer :<br />
« J’avais subi le bourreau <strong>et</strong> j’étais dev<strong>en</strong>u bourreau à mon tour. [...]<br />
Quand j’étais <strong>en</strong>fant j’ai p<strong>en</strong>sé que je n’avais pas besoin de l’affection