Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge
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© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit<br />
LES SOINS POST-IMMÉDIATS (LE DÉBRIEFING) 153<br />
sur <strong>les</strong> id<strong>en</strong>tifications « de moi à moi ». Il apparti<strong>en</strong>t au psychiatre qui<br />
organise le débriefing de juger au cas par cas ce qui convi<strong>en</strong>t de faire.<br />
On peut illustrer c<strong>et</strong> aspect du débriefing <strong>en</strong> racontant l’histoire de ce groupe<br />
de soldats qui avai<strong>en</strong>t vécu, avec leur colonel, un événem<strong>en</strong>t critique. Le<br />
problème qui se posait pour le psychiatre était de savoir s’il pouvait inclure<br />
le colonel dans le débriefing : serait-il capable de se s<strong>en</strong>tir au milieu de ses<br />
subordonnés peu ou pas gradés comme un parmi d’autres ? Le débriefeur,<br />
qui connaissait le colonel, a décidé de le garder dans le groupe, alors même<br />
que celui-ci avait manifesté sa rétic<strong>en</strong>ce à l’organisation de ce g<strong>en</strong>re de<br />
séance, dont il p<strong>en</strong>sait qu’elle ne pouvait que fragiliser ses soldats. Après<br />
la séance de débriefing, le colonel déclara au psychiatre qu’il ne s’était<br />
jamais s<strong>en</strong>ti aussi près de ses hommes. C’était sa façon à lui de dire que<br />
<strong>les</strong> id<strong>en</strong>tifications de « moi à moi » avai<strong>en</strong>t fonctionné (Devillières, 2001).<br />
Une erreur commise par des débriefeurs montre cep<strong>en</strong>dant bi<strong>en</strong> la<br />
nécessité de compr<strong>en</strong>dre <strong>les</strong> raisons de c<strong>et</strong>te règle.<br />
Dans une prison française s’était déroulée une évasion sanglante qui avait<br />
duré plusieurs heures. Le personnel de la prison s’était trouvé dans des<br />
situations très différ<strong>en</strong>tes par rapport à c<strong>et</strong> événem<strong>en</strong>t. Les uns avai<strong>en</strong>t<br />
été <strong>en</strong>fermés dans <strong>les</strong> couloirs des cellu<strong>les</strong> <strong>et</strong> pris <strong>en</strong> otage ; d’autres<br />
avai<strong>en</strong>t constitué des cib<strong>les</strong> parfaites sur <strong>les</strong> miradors, <strong>et</strong>c. Dans <strong>les</strong> jours<br />
qui ont suivi, des débriefings ont été proposés pour chacun des groupes<br />
qui avai<strong>en</strong>t vécu des choses semblab<strong>les</strong>. Le dernier jour, seu<strong>les</strong> deux personnes<br />
demandai<strong>en</strong>t un débriefing. Les débriefeurs <strong>les</strong> ont vues <strong>en</strong>semble<br />
<strong>et</strong> manifestem<strong>en</strong>t la séance ne se déroula pas comme à l’accoutumée.<br />
Les débriefeurs avai<strong>en</strong>t omis le fait que l’un faisait partie du personnel<br />
perman<strong>en</strong>t <strong>et</strong> que l’autre était stagiaire (il n’était là que depuis quinze jours) ;<br />
de plus, l’un avait été <strong>en</strong>fermé dans le bâtim<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>tral tandis que l’autre,<br />
sur son mirador, avait essuyé <strong>les</strong> tirs des mutins. Heureusem<strong>en</strong>t le premier<br />
avait un train à pr<strong>en</strong>dre <strong>et</strong> s’est esquivé rapidem<strong>en</strong>t, il était d’ailleurs peu<br />
touché. Le second s’est r<strong>et</strong>rouvé <strong>en</strong> situation de débriefing individuel. Il a<br />
été possible, à ce mom<strong>en</strong>t, de faire un vrai travail ; il <strong>en</strong> avait du reste besoin<br />
car il avait subi une véritable effraction traumatique. La bonne attitude<br />
aurait consisté à voir ces deux hommes séparém<strong>en</strong>t dès le départ : ils<br />
n’appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t pas au même groupe <strong>et</strong> d’une certaine façon n’avait pas<br />
vécu le même événem<strong>en</strong>t.<br />
Le lieu du débriefing<br />
C’est à partir de c<strong>et</strong>te question qu’a été révolutionnée la psychiatrie<br />
de guerre qui était, à l’époque, la seule qui pratiquait systématiquem<strong>en</strong>t<br />
des soins aux b<strong>les</strong>sés <strong>psychiques</strong>. La psychiatrie dite de « l’avant » a