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Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge

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© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit<br />

CONSÉQUENCES À COURT ET MOYEN TERME DU TRAUMATISME 51<br />

Sans que je le sache donc, je me r<strong>et</strong>rouve <strong>en</strong> équilibre instable au bord du lit<br />

<strong>et</strong> m<strong>en</strong>ace de pivoter dans le vide. Je vois simplem<strong>en</strong>t le sol se rapprocher<br />

puis suis soudainem<strong>en</strong>t pris d’une panique très viol<strong>en</strong>te <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drant un<br />

mouvem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> arrière que je perçois l<strong>en</strong>t <strong>et</strong> à r<strong>et</strong>ardem<strong>en</strong>t. Simultaném<strong>en</strong>t à<br />

c<strong>et</strong>te s<strong>en</strong>sation, <strong>en</strong> remontant, vi<strong>en</strong>t se cumuler un vertige impressionnant,<br />

je ne vois soudain plus ri<strong>en</strong> de l’espace qui m’<strong>en</strong>toure <strong>et</strong> je me trouve<br />

immédiatem<strong>en</strong>t plongé dans un état de confusion profond. Je suis aveugle.<br />

Mon cœur bat très fort. Je n’ai plus consci<strong>en</strong>ce de la position de mon<br />

corps ni de l’espace, comme s’ils n’existai<strong>en</strong>t plus. C<strong>et</strong> état se prolonge<br />

dangereusem<strong>en</strong>t. [...]<br />

Je n’ai aucune notion de l’anormalité de ces faits parce que je suis dans un<br />

état différ<strong>en</strong>t sans consci<strong>en</strong>ce de c<strong>et</strong> état ni de l’antérieur.<br />

Je suis rev<strong>en</strong>u <strong>en</strong> position assise sur le bord de mon lit. Je t<strong>en</strong>te maint<strong>en</strong>ant<br />

de me lever. Le premier essai se solde par un échec immédiat. Durant<br />

<strong>les</strong> suivants, je me dresse progressivem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> m’aidant de mes bras pour<br />

soulever le corps, mais mes jambes me lâch<strong>en</strong>t brusquem<strong>en</strong>t : <strong>les</strong> musc<strong>les</strong><br />

se contract<strong>en</strong>t puis devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t atones, systématiquem<strong>en</strong>t, au début ou au<br />

milieu du mouvem<strong>en</strong>t. [...]<br />

J’ai la s<strong>en</strong>sation très vague d’avoir ress<strong>en</strong>ti une impression de bonheur, de<br />

liberté... peut-être liée à une motricité accrue. [...]<br />

Je n’ai toujours pas à ce stade de notions du travail où je dois me r<strong>en</strong>dre,<br />

des jours précéd<strong>en</strong>ts, <strong>et</strong>c. [...]<br />

(Au bout de dix minutes <strong>en</strong>viron Stéphane parvi<strong>en</strong>t difficilem<strong>en</strong>t jusqu’à son<br />

lavabo.)<br />

Je vois mon image dans la glace. Je me fixe longtemps avec tout d’abord la<br />

s<strong>en</strong>sation floue, imprécise, que je suis « loin de moi-même ». Mon visage<br />

est quand même là, tout près. Je ne suis donc pas si loin... Il est sans vie,<br />

sans expression. Cela n’<strong>en</strong>g<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> moi aucune réaction. Je le scrute. J’ai<br />

<strong>en</strong>vie de porter mon att<strong>en</strong>tion sur <strong>les</strong> yeux mais j’ai peur. Peut-être de ne<br />

pas le reconnaître <strong>et</strong> d’y voir la folie ? C<strong>et</strong>te peur n’est pas int<strong>en</strong>se, elle est<br />

vague, informelle. À l’exam<strong>en</strong> de mon regard, elle se dissipe <strong>et</strong> je ress<strong>en</strong>s<br />

progressivem<strong>en</strong>t une faib<strong>les</strong>se démesurée, une grande fébrilité mêlée à un<br />

imm<strong>en</strong>se élan de t<strong>en</strong>dresse vers mon être, un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’amour profond<br />

<strong>et</strong> très s<strong>en</strong>sible, comme s’il fallait que je porte une affection, une att<strong>en</strong>tion<br />

infinie <strong>en</strong>vers moi, comme cel<strong>les</strong> d’une mère vers son <strong>en</strong>fant, pour le protéger.<br />

Ce s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t s’émousse, je reste immobile face à la glace... Puis une<br />

peine, une frustration inexprimable, absolue, mais impossible à percevoir<br />

aussi fort que je voudrais. Pourquoi ? Je la cherche mais ne la trouve plus.<br />

Elle est partie rapidem<strong>en</strong>t dès que j’ai comm<strong>en</strong>cé à la discerner. Je cherche<br />

à ress<strong>en</strong>tir <strong>en</strong>core mais ne ress<strong>en</strong>s plus ri<strong>en</strong>..., je ress<strong>en</strong>s le sil<strong>en</strong>ce de c<strong>et</strong><br />

être qui me fait face, son impuissance à me répondre. Aucun mot, aucune<br />

image n’émerge <strong>et</strong> ma tête reste vide. Puis je me s<strong>en</strong>s seul au monde,<br />

dépouillé de tout, mon être <strong>en</strong>tier littéralem<strong>en</strong>t pulvérisé, ma vie détruite...<br />

sans que je n’éprouve paradoxalem<strong>en</strong>t maint<strong>en</strong>ant plus aucun s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t,<br />

je cherche <strong>en</strong> vain l’origine de c<strong>et</strong>te idée, c<strong>et</strong>te volonté s’éteint malgré moi,

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