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Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge

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30 CLINIQUE<br />

la lumière s’est obscurcie <strong>et</strong> j’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du un grand froissem<strong>en</strong>t de tôle <strong>et</strong><br />

<strong>les</strong> vitres qui éclatai<strong>en</strong>t. J’ai eu un mom<strong>en</strong>t de vide où il n’y avait plus de<br />

p<strong>en</strong>sées, puis j’ai p<strong>en</strong>sé à ma femme <strong>et</strong> à mes trois <strong>en</strong>fants <strong>et</strong> je me suis dit<br />

que ce serait dommage de ne pas <strong>les</strong> voir grandir. » Il a du mal à s’extraire<br />

du véhicule <strong>et</strong> à rejoindre son camarade qui a été éjecté <strong>et</strong> prés<strong>en</strong>te une<br />

très vilaine fracture ouverte de l’avant-bras. Lui n’a qu’une p<strong>et</strong>ite <strong>en</strong>taille<br />

au cuir chevelu <strong>et</strong> une luxation de la clavicule. Il appelle son régim<strong>en</strong>t sur<br />

son téléphone portable <strong>et</strong> s’occupe de son camarade. Il est très étonné<br />

d’appr<strong>en</strong>dre plus tard qu’<strong>en</strong>tre le mom<strong>en</strong>t de l’accid<strong>en</strong>t <strong>et</strong> son appel il y a<br />

un trou de vingt minutes. Ici, la perte de connaissance n’a ri<strong>en</strong> gommé de<br />

l’expéri<strong>en</strong>ce d’effroi.<br />

Il n’y a pas eu là non plus de réaction immédiate. Les cauchemars<br />

sont apparus dès le surl<strong>en</strong>demain : « le froissem<strong>en</strong>t de tôle <strong>et</strong> la baisse<br />

de la lumière, puis le bras de mon camarade. » Dans l’évolution vers la<br />

guérison, seule c<strong>et</strong>te dernière vision s’imposera quelque temps <strong>en</strong>core.<br />

On peut p<strong>en</strong>ser ici que la perte de connaissance est due à une commotion<br />

cérébrale <strong>et</strong> est sans rapport avec l’effroi qui est parfaitem<strong>en</strong>t<br />

remémoré. Il y a eu peu d’angoisse, mais une activité psychique int<strong>en</strong>se<br />

<strong>et</strong> durable autour de la culpabilité <strong>et</strong> de la mort. Comme chef de bord,<br />

il aurait dû prév<strong>en</strong>ir c<strong>et</strong> accid<strong>en</strong>t, <strong>et</strong> a-t-il fait ce qu’il fallait comme<br />

premiers soins à son camarade ? Sa réflexion sur la mort l’amènera dans<br />

<strong>les</strong> semaines qui suiv<strong>en</strong>t à une crise exist<strong>en</strong>tielle douloureuse, puis à<br />

revoir dans un s<strong>en</strong>s moins « irresponsable » (c’est lui qui le dit) son rôle<br />

de chef de famille. L’expéri<strong>en</strong>ce de l’effroi a été pour ce suj<strong>et</strong>, comme<br />

pour d’autres, un choc salutaire.<br />

Enfin, voici une quatrième observation où un épisode dissociatif<br />

succède à l’effroi.<br />

Observation 4<br />

C<strong>et</strong> homme d’affaires de 28 ans vole à haute altitude dans son p<strong>et</strong>it avion<br />

privé avec son associé. Ils vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t de réaliser un joli profit <strong>et</strong> sont euphoriques.<br />

Il est assis <strong>et</strong> tourne le dos au pilote. Tout d’un coup il « <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d un<br />

boum » <strong>et</strong> le pilote leur demande immédiatem<strong>en</strong>t d’aller s’asseoir à l’arrière.<br />

Il voit alors la vitre du cockpit se f<strong>en</strong>diller, « à c<strong>et</strong>te altitude-là ça ne pardonne<br />

pas », <strong>et</strong> « c’est le black-out, le vide » dans sa tête : « Je ne faisais que<br />

regarder la vitre. » Son collègue, qui pleure bruyamm<strong>en</strong>t, le sort de son<br />

état de saisissem<strong>en</strong>t d’effroi. Ils s’étreign<strong>en</strong>t pour se dire adieu, mais l’idée<br />

qui s’impose à lui à ce mom<strong>en</strong>t, c’est qu’il doit « mourir dignem<strong>en</strong>t ». Ils<br />

s’<strong>en</strong> sort<strong>en</strong>t par miracle <strong>et</strong>, à l’atterrissage, il est gagné par un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t<br />

d’irréalité de ce qu’il vi<strong>en</strong>t de vivre <strong>et</strong> de ce qu’il vit à ce mom<strong>en</strong>t même. Il n’a<br />

qu’une idée <strong>en</strong> tête, aller se coucher <strong>et</strong> dormir. Il dort effectivem<strong>en</strong>t douze<br />

heures d’affilée. Le l<strong>en</strong>demain matin, il écoute <strong>les</strong> informations loca<strong>les</strong> (il vit<br />

dans un pays de l’Europe c<strong>en</strong>trale) où l’on parle de son accid<strong>en</strong>t <strong>et</strong> réalise

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