Traiter les traumatismes psychiques : clinique et prise en charge
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© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit<br />
LA PATHOGÉNIE DES MÉDIAS DANS LES ÉVÉNEMENTS TRAUMATIQUES 101<br />
sont restés intouchés. Désemparés, ils s’isol<strong>en</strong>t à nouveau à moins qu’on<br />
ne vi<strong>en</strong>ne <strong>les</strong> solliciter <strong>en</strong>core à bref délai ou que la première r<strong>en</strong>contre<br />
<strong>les</strong> pousse à rechercher le même interlocuteur.<br />
Une information donnée là où vi<strong>en</strong>t de se produire le drame sur<br />
ses conséqu<strong>en</strong>ces <strong>psychiques</strong> possib<strong>les</strong>, <strong>et</strong> sur l’exist<strong>en</strong>ce de lieux pour<br />
v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> traiter, favorise égalem<strong>en</strong>t une démarche thérapeutique, d’autant<br />
plus que l’<strong>en</strong>tourage a lui aussi reçu la même information. Si ri<strong>en</strong><br />
n’est fait, ni abord initial, ni information, le pati<strong>en</strong>t se s<strong>en</strong>t abandonné,<br />
abandon qui vi<strong>en</strong>t répéter l’abandon contemporain de l’effroi. Prév<strong>en</strong>ir<br />
<strong>et</strong> faire c<strong>et</strong>te offre apparaît alors comme un « don de la parole » (Lacan).<br />
Nous le verrons au chapitre suivant, le discours des médias produit<br />
l’eff<strong>et</strong> inverse : il se substitue à la parole des « victimes » <strong>en</strong> leur<br />
écrivant un rôle, toujours le même, dans une tragédie dont le ressort<br />
est une faute réelle.<br />
Ainsi c<strong>et</strong>te mère dans l’avion de r<strong>et</strong>our vers la France, transportant<br />
avec elle deux urnes cont<strong>en</strong>ant <strong>les</strong> c<strong>en</strong>dres de ses <strong>en</strong>fants noyés par<br />
la vague du tsunami. Elle est <strong>en</strong>core dans le déni. Elle lit <strong>et</strong> relit son<br />
histoire étalée pleine page dans le journal local distribué dans l’avion.<br />
Heureusem<strong>en</strong>t le déni est plus fort que l’écriture du journaliste, ou bi<strong>en</strong><br />
compr<strong>en</strong>d-elle mal l’anglais.<br />
L’interv<strong>en</strong>tion des médias<br />
Avant l’omniprés<strong>en</strong>ce des écrans de télévision, <strong>les</strong> plus anci<strong>en</strong>s<br />
d’<strong>en</strong>tre nous se souvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t de ce personnage des rues typique des<br />
grandes vil<strong>les</strong> : le crieur de journaux. D’une voix sonore il alléchait<br />
le passant avec un fait divers saignant qui valait bi<strong>en</strong> que l’on donne<br />
quelques sous pour <strong>en</strong> connaître <strong>les</strong> détails. Certains médias ont toujours<br />
compté sur le drame <strong>et</strong> l’horreur pour faire fructifier leur commerce<br />
mais, avec la possibilité nouvelle qui leur a été donnée de ne plus<br />
seulem<strong>en</strong>t raconter mais de faire voir, ils sont dev<strong>en</strong>us plus brutaux.<br />
Brutalité dans le recueil des images, viol<strong>en</strong>ce des images imposées au<br />
téléspectateur (Damiani, 1997).<br />
Faisant état d’une <strong>en</strong>quête lancée auprès de personnes touchées par<br />
le détournem<strong>en</strong>t de l’Airbus d’Air France <strong>en</strong> décembre 1994 ou par<br />
l’att<strong>en</strong>tat de Saint-Michel <strong>en</strong> juill<strong>et</strong> 1995, Patrick Lagadec <strong>et</strong> Françoise<br />
Rud<strong>et</strong>zki (Lagadec, Rud<strong>et</strong>zki, 1997) nous donn<strong>en</strong>t des exemp<strong>les</strong><br />
concr<strong>et</strong>s (<strong>et</strong> ahurissants) des méthodes employées. Ces journalistes ne<br />
représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t pas toute la profession, ils apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t néanmoins à de<br />
grands médias nationaux. Les auteurs parl<strong>en</strong>t d’un deuxième traumatisme<br />
pour <strong>les</strong> victimes.