Entre le mon<strong>de</strong> sensible, ou physique, ou grossier, et l’Absolu non manifesté existeune série <strong>de</strong> niveaux <strong>de</strong> l’énergie et <strong>de</strong> <strong>la</strong> matérialité, <strong>de</strong> plus en plus subtils ou raffinés,auxquels les cinq sens ne nous donnent pas accès. Ces niveaux s’interpénètrent, un peu<strong>com</strong>me une éponge contient <strong>de</strong> l’eau, l’eau contient <strong>de</strong> l’oxygène et <strong>de</strong> l’hydrogène, lesmolécules contiennent <strong>de</strong>s atomes, les atomes contiennent..., etc. Ces niveaux existent enl’homme mais l’homme n’en est ordinairement pas conscient.L’inconscient ou le non-conscient connu <strong>de</strong> <strong>la</strong> science esotérique est donc infinimentplus vaste que celui qui a été « découvert » par Freud et même par Jung. La perception <strong>de</strong>ces p<strong>la</strong>ns <strong>de</strong> l’inconscient, ou du paraconscient, ou du supraconscient, est le fruit <strong>de</strong> <strong>la</strong>transformation <strong>de</strong> l’être par <strong>la</strong> sadhana, par le yoga, par <strong>la</strong> méditation. Encore faut-ilpréciser que <strong>la</strong> perception croissante <strong>de</strong> ces p<strong>la</strong>ns plus profonds <strong>de</strong> <strong>la</strong> manifestation neconduit pas forcément à <strong>la</strong> Libération.Avant d’accé<strong>de</strong>r à une réalisation <strong>de</strong>s niveaux plus vastes <strong>de</strong> <strong>la</strong> réalité totale, il fautd’abord atteindre <strong>la</strong> perfection <strong>de</strong> <strong>la</strong> vision ordinaire. Par rapport à <strong>la</strong> vision réelle (vidya,parajnana) <strong>la</strong> vision du mental est toujours mensongère puisqu’elle limite l’illimité,soumet l’éternel au temps, morcelle l’unique. Mais, même au p<strong>la</strong>n le plus extérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong>manifestation, le mental est loin <strong>de</strong> fonctionner <strong>de</strong> façon harmonieuse. Ici, mais iciseulement, c’est-à-dire seulement à ce niveau le plus limité, le plus grossier et le plusextérieur, <strong>la</strong> psychologie mo<strong>de</strong>rne dite « <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs » retrouve certaines <strong>de</strong>sconnaissances <strong>de</strong> l’ancienne <strong>sagesse</strong>.La voie est une trans-formation, une méta-morphose. Selon l’image sensible si connue,mais si explicite, <strong>la</strong> chenille meurt pour <strong>de</strong>venir papillon. <strong>Les</strong> ailes ne poussent pas sur ledos <strong>de</strong>s chenilles. La psychologie contemporaine — ainsi que toutes les autres scienceshumaines — ne connaît que l’homme-chenille et refuse <strong>de</strong> tenir <strong>com</strong>pte <strong>de</strong> l’hommepapillon.Ce dont parle <strong>la</strong> science initiatique, ce dont parlent les Chemins <strong>de</strong> <strong>la</strong> Sagesse, c’est <strong>de</strong><strong>la</strong> mort <strong>de</strong> <strong>la</strong> chenille et <strong>de</strong> <strong>la</strong> naissance du papillon. Mais une chenille anormale, ma<strong>la</strong><strong>de</strong>,débile, difforme, ne se transforme pas en papillon. La voie <strong>com</strong>mence donc avec <strong>la</strong>normalisation et <strong>la</strong> guérison <strong>de</strong> <strong>la</strong> chenille en tant que chenille, et certaines véritésprimaires s’expriment en termes <strong>de</strong> psychologie. Encore faut-il avoir <strong>de</strong>s idées c<strong>la</strong>ires :l’adhyatma yoga est une discipline pour croître au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> son niveau normal et non unethérapeutique pour se débarrasser d’une névrose ou une <strong>com</strong>pensation aux frustrations.Le maître spirituel incarne <strong>de</strong>s connaissances, transmet un enseignement et gui<strong>de</strong> sur lechemin d’une évolution dont <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s psychothérapeutes ignorent tout.Dans <strong>la</strong> pratique, « l’ego» (ahamkar), sens <strong>de</strong> l’individualité séparée (ou du moi et dunon-moi) et le « mental » (manas) sont une même réalité — ou plutôt une mêmeapparence. L’être humain normal est constitué par un « Je » recouvert par le mental. Ceterme « mental» <strong>com</strong>prend non seulement les pensées mais les émotions et les sensations,non seulement le conscient mais l'inconscient, autrement dit tout ce qui est re<strong>la</strong>tif etsoumis aux paires d’opposés. « Je » est stable, le mental est sans cesse changeant. « Je »*
est <strong>la</strong> réalité, le mental est l’apparence. Et surtout, c’est le mental qui aime et qui n’aimepas, qui a <strong>de</strong>s désirs et <strong>de</strong>s répulsions, ce n’est pas « Je ». «Je » est neutre. On peut être unsaint et conserver un mental, donc <strong>la</strong> conscience <strong>de</strong> <strong>la</strong> dualité. Le sage est affranchi dumental. Nous avons l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> distinguer le mental et le corps beaucoup pius que ne lefont les Orientaux qui les considèrent <strong>com</strong>me une unité, body mind <strong>com</strong>plex.« Je », absolu, réel, illimité, s’i<strong>de</strong>ntifie avec le corps mental, en particulier avec le nomdans l’enfance «Je »s’i<strong>de</strong>ntifie avec Paul, avec John, avec Pedro, puis, plus tard, avecPaul Dupont, John Smith, Pedro Alvarez. « Je suis »s’i<strong>de</strong>ntifie (ou, plus rigoureusement,paraît s’i<strong>de</strong>ntifier) à un nom et à une forme le corps. Si « Je suis », je suis ce que je suis.Si « Je suis i<strong>de</strong>ntifié », je suis i<strong>de</strong>ntifié avec ce que je ne suis pas. En vérité je ne suis ni lenom ni <strong>la</strong> forme. Dans l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>meure une dualité Je et l’objet <strong>de</strong>l’i<strong>de</strong>ntification. Deux peuvent toujours être séparés. Deux ne peuvent pas ne pas être tôtou tard séparés. Aucune i<strong>de</strong>ntification n’est définitive.Il est dit et redit dans toutes sortes <strong>de</strong> livres sur l’hindouisme ou sur <strong>la</strong> méditationqu’on « <strong>de</strong>vient ce sur quoi on fixe ses pensées ». C’est vrai, que l’on fixe ses penséesvolontairement ou involontairement. Mais si l’on « <strong>de</strong>vient », <strong>de</strong>ux subsistent. Il y aseulement i<strong>de</strong>ntification. En vérité je ne peux <strong>de</strong>venir, au sens <strong>de</strong> n’être qu’un, que ce queje suis déjà. Ce qui a un <strong>com</strong>mencement et une cause ne peut pas être durable. Ce quivient s’en va. La vérité est. Si <strong>la</strong> vérité <strong>de</strong>vait venir, elle <strong>de</strong>vrait aussi partir. La vérité est,mais elle est cachée, recouverte. Je suis atman, Je suis brahman, recouvert, enveloppé parles corps psychiques et le corps physique. Je peux découvrir brahman que je n’ai jamaiscessé d’être mais non <strong>de</strong>venir brahman. Mais <strong>com</strong>ment pourrais-je fixer mes pensées surbrahman, méditer sur brahman, puisque je ne Le connais pas? Je peux seulement meconcentrer sur l’idée que je m’en fais et tout reste à l’intérieur du mental.L’i<strong>de</strong>ntification par fixation <strong>de</strong>s pensées fait croire à l’unité mais cette fausse unitésera forcément rompue par <strong>de</strong>s conditions ou <strong>de</strong>s circonstances nouvelles. Dans lesdébuts <strong>de</strong> <strong>la</strong> passion amoureuse, <strong>de</strong> l’amour-fascination, chaque partenaire croitsincèrement ne faire qu’un avec l’autre. Mais <strong>la</strong> vérité est qu’il ne ressent pas « Je suisl’autre. » Il ressent «L’autre est moi. » Cette i<strong>de</strong>ntification, qui est un jeu du mental, estdétruite dès que l’autre montre qu’il est, en effet, un autre en se conduisant différemment<strong>de</strong> ce qu’attend le partenaire. Beaucoup d’hindous sont troublés par le fait qu’après avoirproc<strong>la</strong>mé « Le Père et moi sommes un », le Christ ait pu dire, avec le psaume: « MonDieu, mon Dieu, pourquoi m’as-Tu abandonné ? »<strong>com</strong>me s’il avait été seulementi<strong>de</strong>ntifié avec le Père et non un avec Lui et que cette i<strong>de</strong>ntification ait été brisée par lessouffrances <strong>de</strong> <strong>la</strong> Passion.Ainsi le « je », c’est-à-dire concrètement le petit enfant, à force <strong>de</strong> fixerinconsciemment sa pensée sur son nom et son corps, « <strong>de</strong>vient » ce nom et cette forme.Toutes les premières expériences <strong>de</strong> l’enfant, ce qu’il fait <strong>de</strong> « bien »et ce qu’il fait <strong>de</strong> «mal », se passent sur le p<strong>la</strong>n physique. Le petit enfant n’a pas encore d’idées. Peu à peu ils’i<strong>de</strong>ntifie avec ce corps (body consciousness). L’enfant parle d’abord <strong>de</strong> lui à <strong>la</strong>troisième personne, se désigne par son prénom, puis, peu à peu, il s’i<strong>de</strong>ntifie avec ceprénom. La forme et le nom sont les <strong>de</strong>ux piliers <strong>de</strong> l’ego ou du mental. Le chercheur <strong>de</strong>
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tant que vague n’est rien, tellem
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Libéré, libération. Le sage est
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peut pas envisager. Et, pourtant, c
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toutes choses. » Quel homme ? L’