télécharger au format PDF - Archives de l'Adrar des Ifoghas

LES TOUAREG.
sembler un hors-d'oeuvre, j'aurais voulu rendre
telles que je les ressentis, et l'animalité stupide de
ce malheureux captif, abruti par des années d'esclavage,
type accompli des infortunées victimes du
même sort, et la profonde tristesse que m'a causée
cette constatation évidente de la déchéance humaine,
constatation qui blessait profondément mes
sentiments, mes convictions, les théories de solidarité,
de justice et d'humanité, que j'émettais sans
cesse auprès du personnel européen et indigène du
cercle, afin de rendre plus intime, plus conforme à
mes vues, leur collaboration à la tâche administrative
qui nous était confiée.
Souvent, hélas, par la suite, j'éprouvai de nouveau
cette pénible impression de complète dégradation,
chez des êtres n'ayant plus de l'homme que
le langage articulé et la forme extérieure. Elle se
renouvela chaque fois que je voulus améliorer la
triste situation des Songhay qui peuplent les îles
et les bords du Niger. Ces malheureux, descendants
de ceux qui créèrent le brillant et puissant empire
de Gogo, sont craintifs, lâches, indifférents à tout,
paresseux et abêtis. Les brutalités, les exactions
des Touareg, une servitude de trois siècles, ont réduit
à ce lamentable état les petits-fils des industrieux
commerçants fondateurs de Djéné, Tombouctou
et Gao.
Notre tâche, à nous Français, n'en est que plus
(52)