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Agone n° 18-19 - pdf (1090 Ko) - Atheles

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METTRE LA GÉNÉTIQUE À LA DISPOSITION DE L’HUMANITÉ…<br />

fonction d’intérêts non strictement scientifiques et si les généticiens ne<br />

risquent pas, à cette occasion, de perdre la maîtrise de leur questionnement.<br />

PHILIPPE FROGUEL : Nous vivons une phase un peu réductionniste de<br />

la génomique, qui consiste, en gros, à faire l’inventaire des gènes<br />

humains et d’organismes d’intérêt, et à cartographier leur génome. À<br />

partir de ces connaissances « brutes », certains considèrent que l’on<br />

pourra utiliser de manière linéaire ces données pour transformer la<br />

médecine et l’agriculture. En fait, l’identification des gènes humains<br />

ne résoudra en rien les problèmes de l’humanité : il faudra des<br />

décennies pour comprendre leur rôle, leur fonctionnement et le rôle<br />

de leurs anomalies dans le développement des maladies. Cette vision<br />

« simpliste » n’est pas innocente : elle est probablement<br />

intentionnelle, car elle valorise les « banques » de données<br />

génomique privées. La quantité incroyable de données nouvelles<br />

dont nous commençons à disposer réhabilitera, au contraire, la<br />

recherche fondamentale sur le fonctionnement du vivant – à<br />

condition que ces informations soient à la disposition de la<br />

communauté scientifique. Le généticien va perdre le contrôle de son<br />

enfant, et le futur de la bio-médecine est probablement dans les<br />

mains des biologistes et des physiologistes qui sauront comprendre<br />

les mécanismes de fonctionnement et d’interaction de toutes ces<br />

protéines produites par nos gènes.<br />

AGONE : L’autonomie de la production scientifique ne reste-t-elle pas le seul<br />

garant d’une évolution des sciences ayant pour fin d’expliquer le monde et<br />

de fournir des découvertes « utiles au plus grand nombre » ? Peut-on<br />

espérer que se créent, à l’intérieur de la science, les conditions d’une<br />

résistance aux « sirènes » du marché ?<br />

PHILIPPE FROGUEL : Les généticiens hésitent en permanence entre<br />

deux attitudes contradictoires. Soit faire, par exemple, comme les<br />

informaticiens : se mettre au service du marché et fabriquer des<br />

nouveaux produits rentables. Soit être des médecins-chercheurs<br />

au service du malade, et dont les recherches doivent être utiles à<br />

l’humanité tout entière – ce dernier schéma, qui correspond au<br />

mythe pasteurien, a conduit certains généticiens à s’intéresser de<br />

près à la bio-éthique, voire à déborder de leur champ sur celui

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