23.06.2013 Views

Agone n° 18-19 - pdf (1090 Ko) - Atheles

Agone n° 18-19 - pdf (1090 Ko) - Atheles

Agone n° 18-19 - pdf (1090 Ko) - Atheles

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

88<br />

LE CARACTERE ÉVALUATIF DE LA SCIENCE SOCIALE WÉBÉRIENNE<br />

à fait « évaluative ». Mais on peut aller plus loin encore en soutenant<br />

que la seconde, au fond, l’emporte sur la première. Surtout si, comme<br />

on le devrait, on met au premier plan sa manière « concrète » de faire<br />

de la sociologie plutôt que sa théorisation de la tâche du savant et des<br />

procédés des sciences sociales. Enfin, si l’on mesure celle-ci à celle-là<br />

– et non le contraire.<br />

De nombreux chercheurs ont saisi – du moins en partie – le<br />

caractère précisément évaluatif de la sociologie wébérienne.<br />

Mommsen, par exemple, affirme que la « grande sociologie de Weber<br />

n’est nullement libre de jugements de valeur (Wertfreiheit) ». Selon lui,<br />

elle est « complètement axée sur une perspective d’histoire<br />

universelle, elle-même à son tour ancrée à ses convictions libérales ».<br />

Mommsen ajoute que, même les choix méthodologiques les plus<br />

importants de Weber – tels sa construction des types idéaux ou son<br />

approche radicalement individualiste de la vie sociale<br />

(« appréhendée » en termes de combinaison d’actions sociales) – ne<br />

sont en aucune manière « neutres ». On ne peut penser la sociologie<br />

wébérienne sans « faire référence aux valeurs fondamentales » – c’està-dire<br />

à la conception du monde selon Weber 2 .<br />

Citons également Horkheimer, Habermas et Marcuse qui, au<br />

congrès de Heidelberg en avril <strong>19</strong>64, montrèrent à quel point la<br />

prétention wébérienne de Wertfreiheit était pour le moins douteuse –<br />

et peut-être mystifiante. Et comment, à travers les concepts « nonévaluatifs<br />

» d’organisation rationnelle et de rationalité passe,<br />

directement ou indirectement, l’idée que la « rationalité » capitaliste<br />

est l’inévitable et malheureux destin historique de l’Occident et du<br />

monde moderne 3 .<br />

corps étrangers à la sociologie wébérienne, qui devrait donc, pour être une<br />

sociologie, être méta-historique, c’est-à-dire anhistorique.<br />

2. W. Mommsen, Max Weber e la politica tedesca <strong>18</strong>90-<strong>19</strong>20, Bologna, Il<br />

Mulino, <strong>19</strong>93, p. 125. (C’est nous qui soulignons.)<br />

3. Adorno et alii, Max Weber e la sociologia oggi, Milano, Jaca Book, <strong>19</strong>67,<br />

pp. 89-92, 99-107 & 202-225. Horkheimer est le moins clair : d’une part il<br />

dit n’être « jamais venu à bout de la doctrine de la non-évaluation », mais il<br />

craint que cela soit un « obstacle à la pensée » ; d’autre part, il pense que<br />

Weber ne s’y est pas conformé. Marcuse, par contre, voit dans le « concept<br />

non-évaluatif de rationalité capitaliste » une critique potentielle de la

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!