(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

LES VACANTS EN CERDAGNE …
Il est une question majeure dans l’étude des modes d’appropriation et
d’exploitation des vacants, celle des spatialités propres à chaque société2. Si
l’on considère que les configurations spatiales sont tout à la fois productrices
de systèmes sociaux et le produit de ceux-ci, le champ d’investigation paraît
alors vaste, démesuré. Dans cette énorme bulle qui englobe tout l’étagement
altitudinal du massif, deux interrogations ont plus particulièrement attiré
notre attention. De quelle manière l’écrit enregistra-t-il les constructions
territoriales des XIIIe et XIVe siècles ? Comment les communautés mirentelles
en forme les modes d’accès aux forêts et aux terrains de pâtures ?
Nous nous proposons d’ouvrir le débat en nous appuyant principalement
sur deux types de chartes : les concessions seigneuriales faites aux
communautés de ce qu’il est convenu d’appeler “ droit d’usage ” et les sentences
d’arbitrages inter-communautaires. Tout d’abord, nous analyserons
les modes de définition scripturaires de l’espace puis les axes de confrontation
entre logiques du discours écrit et pratiques. Enfin, nous envisagerons
quelques aspects des modalités d’appropriation des terres ermes.
ESPACE DES TEXTES ET ESPACE VÉCU
De quelle manière les communautés rurales livrèrent-elles à
l’ordonnancement de l’écrit les lieux faisant l’objet d’appropriation, de revendication
ou de litige ? La question peut sembler banale sauf à considérer
l’ampleur des enjeux noués autour de la parole portée à l’écrit en ce Moyen
Âge finissant3. En conséquence, toute approche de la dimension spatiale des
sociétés de ce temps ne peut passer outre une analyse des procédés scripturaires
de définition et de délimitation des zones sylvo-pastorales. À compter
des ultimes décennies du XIIe siècle en effet, concessions seigneuriales,
arbitrages inter-communautaires, règlements de pacage ou de forestage se
conjuguent pour offrir, par accumulation, une palette de cas de figure susceptibles
d’alimenter le discours sur les manières de “ dire l’espace ”.
2 Cette question reste étonnament quasi-absente des travaux récents sur les montagnes alpines
(J.P. Boyer, Hommes et communautés du haut pays niçois. la Vésubie (XIIIe-XVe), Nice,
Centre d’Études Médiévales, 1990 ; H. Falque Vert, Les hommes et la montagne en Dauphiné
au XIIIe siècle, Grenoble, PUG, 1997 ; N. Carrier, La vie montagnarde en Faucigny à la fin
du Moyen Âge. Économie et société, Paris, L’Harmattan, 2001.
3 R. Viader, “Silences, murmures, clameurs : les communautés pyrénéennes au Moyen Âge”,
La ciutat i els poders. La ville et les pouvoirs, Actes du huitième centenaire de la charte de
Perpignan,(octobre 1997), Perpignan, 1999, pp. 230-246.
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