(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

SALVATGINES ET SOCIÉTÉS MONTAGNARDES...
des ours, les Grands Tétras et les Isards ! Grâce à eux, nous entrons dans
l’ère de la statistique sous la forme de tableaux précis récapitulant le nombre
d’animaux détruits, fort utiles pour mesurer les effets de la chasse encouragée
par les pouvoirs publics.
Second gisement d’informations, celui des communautés laïques et
ecclésiastiques qui, pour la période d’Ancien Régime, pallie souvent les
lacunes documentaires de l’administration. Rédigées sous l’égide des seigneurs
locaux, les « criées » villageoises s’intéressent non seulement aux
pratiques agraires mais également aux usages cynégétiques sous la forme de
textes stéréotypés qui ont néanmoins le mérite d’énumérer les animaux
chassés par les paysans. « Filon » amplement utilisé par Jean-Claude
Bouchet dans sa thèse consacrée à la chasse dans les Pyrénées centrales et
occidentales, les registres comptables des communautés consignent les primes
versées pour l’ « élimination des animaux malfaisants » aux chasseurs
du village4. À la différence du Béarn et de l’Andorre, peu de documents de
ce type ont été conservés et c’est à peine si l’on retrouve quelques fragments
de comptabilité communale pour Prats-de-Mollo au début du XVIIe siècle.
Ces comptes consulaires recensent à plusieurs reprises des Llops et même
des Llops servera éliminés sur le territoire de la localité5. Les archives
communales recèlent aussi un bel exemple de procès-verbal de destruction
de loup par un chasseur patenté du village en 1835. Dernière source laïque à
ne pas négliger, les enquêtes de l’époque révolutionnaire (série L) qui autorisent
une approche de l’état de l’armement détenu par les montagnards
catalans.
À peine effleurés, les fonds des grandes abbayes de Saint-Martin-du-
Canigou et de Saint-Michel-de-Cuxa contiennent, outre des doubles de
criées, de nombreux règlements de chasse auxquels s’ajoutent les livres de
comptes où il est fait mention des redevances en nature, notamment de la
pierna, la « cuisse » de chaque grosse bête tuée sur les terres abbatiales, ainsi
que les dépenses de bouche, souvent composées de venaisons6.
Plus surprenants peut-être, les actes notariés apportent un éclairage
complémentaire en donnant une épaisseur plus sociale. Instrument de crédit
agricole, le bail à gazaille est une formule attractive par laquelle le preneur
trouve, sans bourse délier, un fonds de bétail, à charge pour lui de veiller à sa
conservation et à son entretien. Au terme du contrat, il devait en rendre
compte au bailleur en partageant avec lui le croît. Quant au second contrac-
4 J.C. BOUCHET, Histoire de la chasse dans les Pyrénées françaises (XVIe-XXe siècles),
Pau, Marrimpouey, 1990, 251p.
5 Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 7 J 46.
6 Arch. dép. Pyrénées-Orientales, H 159.
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