01.05.2013 Views

(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

EMMANUEL GARNIER<br />

ordonnance prévoit <strong>de</strong> concé<strong>de</strong>r aux colons <strong>de</strong>s portions entières <strong>de</strong> forêt à<br />

condition qu’ils les brûlent ! Quarante sept ans plus tard, le mot d’ordre<br />

royal n’a pas changé comme le confirme un édit qui autorise les habitants<br />

d’Esposoyla (Espousouilles), attaqués per moltes salvatgines, axi <strong>de</strong> porcs<br />

senglars com d’osses, à incendier les bois <strong>de</strong> la châtellenie <strong>de</strong> Puyvalador, à<br />

l’exception <strong>de</strong> la forêt royale <strong>de</strong> la Mata9. La faveur royale est <strong>de</strong> taille mais<br />

il en va <strong>de</strong> l’avenir <strong>de</strong> la colonisation dans la région que les premiers<br />

habitants menacent d’abandonner si les autorités ne réagissent pas. Désormais,<br />

les hommes <strong>de</strong> la communauté ont la « liberté » <strong>de</strong> détruire la forêt<br />

sans même en référer aux forestiers royaux, privilège exorbitant qui ne<br />

s’explique guère que par la volonté étatique <strong>de</strong> fixer à tout prix une population<br />

pionnière dans une marche montagnar<strong>de</strong> stratégique où les monarques<br />

disposent d’ailleurs d’une rési<strong>de</strong>nce d’été à Formiguères.<br />

Le recours au feu pour déloger les bêtes fauves n’a rien d’original, il<br />

se r<strong>et</strong>rouve en d’autres lieux pour <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s postérieures. Les habitants <strong>de</strong><br />

Prats-<strong>de</strong>-Mollo y font appel en 1406 pour repousser <strong>de</strong>s ours <strong>de</strong>venus trop<br />

pressants avec le troupeau communal. En Andorre, l’alliance du feu <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

l’homme contre l’animal se perpétue même jusqu’au XVIIe siècle dans la<br />

vallée <strong>de</strong> la Gran Valira. Comme sur le versant roussillonnais, les populations<br />

n’hésitent pas à incendier <strong>de</strong> vastes massifs pour lutter contre les loups<br />

<strong>et</strong> les ours, une pratique aux conséquences écologiques désastreuses.<br />

Cinquante-sept ours furent éliminés <strong>de</strong> la sorte entre 1600 <strong>et</strong> 1700 dans les<br />

seules communautés d’Andorra-la-Vieille <strong>et</strong> <strong>de</strong> la Massana. Outre l’avantage<br />

<strong>de</strong> disperser les fauves <strong>et</strong> d’en éliminer beaucoup, la technique du feu<br />

favorise le passage <strong>de</strong> la vieille forêt « primaire » à une forêt secondaire<br />

pauvre en sapins, plus facile à convertir en terres arables ou en pâturages.<br />

Sans doute ces espaces dégradés sont-ils à l’origine <strong>de</strong>s <strong>de</strong>vesas <strong>de</strong> l’époque<br />

mo<strong>de</strong>rne.<br />

L’apogée du pastoralisme <strong>et</strong> l’éradication <strong>de</strong>s<br />

« nuisibles » (XVIIe-XVIIIe siècles)<br />

Partageant un territoire i<strong>de</strong>ntique avec <strong>de</strong>s hommes toujours plus<br />

nombreux qui, à compter <strong>de</strong>s années 1600, font un choix économique décisif<br />

en développant un élevage extensif dans les zones d’estives, les grands prédateurs<br />

adoptent <strong>de</strong> nouveaux comportements alimentaires qui ne tar<strong>de</strong>nt pas<br />

à porter directement atteinte au cheptel villageois.<br />

Faut-il le rappeler ? Le régime alimentaire <strong>de</strong> l’ours en milieu naturel<br />

préservé <strong>de</strong> l’influence anthropique paraît très éclectique puisqu’il se<br />

compose indifféremment <strong>de</strong> fourmis, d’insectes <strong>de</strong> toutes sortes <strong>et</strong> <strong>de</strong> mi-<br />

9 Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 1 B 153.<br />

335

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!