(Cerdagne) : conflits de propriété et d'usage - Centre de Recherches ...

LA GESTION DE LA FORÊT DANS LA PROVINCE DU ROUSSILLON AU XVIII e S.
d’Odeillo réclame l’application de l’Ordonnance de 1669 (œuvre de Colbert)
qui n’a été enregistrée par le Conseil Souverain qu’en 1759 à la suite d’un
« oubli » quasi séculaire et précise que les criées renouvelées devront être
publiées à Via et à Bolquère afin que nul n’en ignore. Ce rappel à la règle
joue donc le rôle d’une vague menace, d’une épée de Damoclès susceptible
d’intimider les plus craintifs.
2. La médiocrité de la répression a-t-elle entraîné ou favorisé un recul
de la forêt ? Nous ne pouvons pas formuler de réponse précise à cette question
pourtant fondamentale. On peut citer des cris d’alarme allant dans ce
sens dans le Haut-Vallespir ou dans la commune de Mosset par exemple
mais ces données sont ponctuelles, difficilement vérifiables. Il est probable
que l’augmentation de la pression démographique et les appétits des maîtres
de forge ont poussé, ici ou là, à dépasser les possibilités de régénération de la
forêt.
3. Les bouleversements institutionnels opérés par la Révolution et les
régimes subséquents ont-ils amélioré la gestion forestière et clarifié les pratiques
des communautés usagères ? Bien que le chantier soit vaste et inégalement
exploré, on peut répondre clairement par la négative. La plupart des
forêts seigneuriales sont devenues domaniales et l’action des nouvelles administrations
des eaux et forêts a été toute entière orientée dans le but de
chasser les paysans des forêts de l’État. Récusant la légitimité du vieil usage
Stratae, les administrateurs et les magistrats ont exigé que les communes
produisent des titres particuliers qu’elles n’avaient jamais eus ou dont elles
ne pouvaient fournir la preuve. À l’issue de véritables marathons judiciaires
menés avec acharnement, toutes les communes ont perdu leurs droits à
l’exception de La Llagonne, de Sauto et d’Aiguatebia. Du coup, les violences
forestières ont été exacerbées et ont pris l’allure de véritables insurrections
dont le point d’orgue sera la période 1848-1852. Le Second Empire
ramènera progressivement le calme par un mélange habile de concessions et
de répression, aidé en cela par un début d’exode rural qui rendra la question
moins brûlante.
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