Le cabinet des fs, ou collection choisie des contes des fs, et autres ...

Contes Arabes. 137
apperçut dans la cabane. Elle paroi fToit plon-
gée clans une profonde tridefTe ; elle avoit les
mains liées ; &: l'on voyoit à {qs plés un petit
enfant de deux ou trois ans , qui, comme s'il
eut déjà fenti les malheurs de fa mère, pleu-
roit fans relâche, & faifoit retentir l'air de
fes cris.
Mon père frappé de cet objet pitoyable, fut
d'abord tenté d'entrer dans la cabane ôc d'atta-
quer le géant ; mais faifant réflexion que ce
combat feroit trop inégal, il s'arrêta, & réfo^
lut , puifque fes forces ne futfifoient pas , de
s'en défaire par furprife. Cependant le géant ,
après avoir vuidé la cruche & mangé plus de
la moitié du bccuf, fe tourna vers la femme,
& lui dit : Belle princefle, pourquoi m'obligez-
vous par votre opiniâtreté à vous traiter avec
rigueur ? il ne tient qu'à vous d'être heureufe ;
vous n'avez qu'à prendre la refolution de m'aî-
mer & de m'être fidelle, & j'aurai pour vous
^Qs manières plus douces. O fatyre afifreux,
répondit la dame , n'efpcre pas que le tems
diminue l'horreur que j'ai pour toi ; tu feras;
toujours un monftre à mes yeux. Ces mots
furent fuivis de tant d'injures , que le géant en
fut irrité. C'en ell; trop, s'écria-t-U d'un ton
furieux , mon amour méprifé fe convertit ei^
rage : ta haine excite enfin la mienne i je fea*