Le cabinet des fs, ou collection choisie des contes des fs, et autres ...

4^4 tES MILLE Èi* t/NE NuiTg,'
bien-aife néanmoins d'en avoir la confirmatiod
par le témoignage de votre fils : allez , & de-
mandez-lui ce qui en eft.
Le grand-vifir ne différa pas d^aller joindre
fon fils ; il lui fit part de ce que le fultan
venoit de lui communiqyer , & il lui enjoi-
gnit de ne lui point déguifer la vérité , & de
lui dire (i tout cela étoit vrai. Je ne vous la
déguiferai pas , mon père , lui répondit le fils,
tout ce que la princefl'e a dit au fultan eft
vrai ; mais elle n'a pu lui dire les mauvais
traitemens qui m'ont été faits en mon parti-
culier : les voici. Depuis mon mariage j'ai
paffé deux nuits les plus cruelles qu'on puifTe
imaginer, & je n'ai pas d'expreiîîons pour vous
décrire au jufle & avec toutes leurs circonf-
tances les maux que j'ai foufferts. Je ne vous
parle pas de la frayeur que j'ai eue de me
fentir enlever quatre fois dans mon lit , fans
voir qui enleyoit le lit , & le tranfportoit
d'un lieu à un autre , & fans pouvoir imagi-
ner comment cela s'eft pu faire. Vous jugerez
vous-même de l'état fâcheux oii je me fuis
trouvé , lorfque je vous dirai que j'ai paffé
deux nuits debout & nud en chemife dans
une efpèce de privé étroit , fans avoir la li-
berté de remuer de la place où je fus pofé >
& fans pouvoir faire aucun mouvement , quoi-