Le cabinet des fs, ou collection choisie des contes des fs, et autres ...

Contes A r a b i s. a^j
Snîcre fois , & que pour mon malheur vous
laifsâtes !a porte de ma chambre ouverte ; qui
voulût bien palTer les foirées à boire avec moi;
qui fût chanter, jouer des inftrumens & m'en-
tretenir agréablement ; qui ne s'étudiât enfin qu'à
me plaire & 4, me divertir ; je crois au con«
traire que je changerois toute mon indifférence
en un parfait attachement pour une telle per-
fonne , & que je croirois vivre très -heureux
avec elle. Mais où trouver une femme telle
que je viens de vous la dépeindre, ailleurs que
dans le palais du commandeur des croyans
chez le grand-vifir Giafar , ou chez les feigneurs
de la cour les plus puiflans , à qui l'or & l'ar-
gent ne manquent pas pour s'en pourvoir?
J'aime donc mieux m'en tenir à la bouteille ;
c'eft un plaifir à peu de frais qui m'cft commun
avec eux. En difant ces paroles , il prit
la taife & il fe verfa du vin : Prenez votre
taffe , que je vous en verfe aufîi, dit-il au ca-
life , & continuons de goûter un plaifir fi char-
, ^
mant.
Quand le calife & Abou HafTan eurent bu î
C'eft grand dommage , reprit le calife , qu'un
auflfi galant homme que vous êtes , qui n'efl
pas indifférent pour l'amour , mène une vie fi
folitaire & fi retirée.
Je n'ai pas de peiûe, repartit Abou HafTan
Tome ^
R