Le cabinet des fs, ou collection choisie des contes des fs, et autres ...

ï4 Les mille et une Nuits,
inent le coffre , & y laiffa entrer l'air. En fortant
du cimetière , il tira la porte après lui : &
comme celle de la ville étoit ouverte , il eut
bientôt trouvé ce qu'il cherchoit. Il revint au
cimetière , où il aida le muletier à charger le
coffre en travers fur le mulet; & pour lui oter
tout foupçon 5 il lui dit qu'il étoit arrivé la nuit
avec un autre muletier , qui , prefle de s'en re-
tourner, avoit déchargé le coffre dans le ci-
metière.
Ganem , qui depuis fon arrivée à Bagdad ,
ne s'étoit occupé que de fon négoce, n'avoit
pas encore éprouvé la puiffance de l'amour. Il
en fentit alors les premiers traits. Il n'avoit pu
voir la jeune dame fans en être ébloui ; & l'in-
quiétude dont il fe fentit agité en fuivant de
loin le muletier , & la crainte qu'il n'arrivât en
chemin quelque accident qui lui fit perdre fa
conquête , lui apprirent à démêler fes fenti-
mens. Sa joie fut extrême , lorfqu'étant arrivé
heureufement chez lui, il vit décharger le cof-
fre. Il renvoya le muletier ; & ayant fait fermer
par un de fes efclaves la porte de fa maifon
il ouvrit le coffre, aida la dame à en fortir
lui préfenta la main, & la conduiiit à fon ap-
partement en la plaignant .de ce qu'elle devoit
avoir fouffert dans une fî étroite prifon. Si j'ai
fouffert, lui dit-elle, j'en fuis i?ien dédom-
,