Le cabinet des fs, ou collection choisie des contes des fs, et autres ...

Contes Arabes. 29$
'Commandeur des croyans , répondit Abou
HafTan avec des fanglots & des foupirs réi-
térés , il ne pouvoit m'arriver un plus grand
malheur, que celui qui fait le fujet de mon
affliaion. Que dieu laiffe vivre votre majefté
fur le trône qu'elle remplit fi glorieufement :
Nouzhatoul-Aouadat qu'elle m'avoit donnée en
mariage par fa bonté, pour paffer le refte de
mes jours avec elle hélas !
A cette exclamation , Abou HafTan fit fem-
blant d'avoir le cœur fi prefTé , qu'il n'en dit
pas davantage, & fondit en larmes.
Le calife qui comprit qu'Abou HaflTan ve-
noit lui annoncer la mort de fa femme , en
parut extrêmement touché : Dieu lui faflTe mifé-
ricorde , dit-il d'un air qui marquoit combien
il la regrettoit ; c'étoit une bonne efclave ,
& nous te l'avions donnée Zobéïde & moi,
dans l'intention de te faire plaifir j elle méri-
toit de vivre plus long-tems. Alors les larmes
lui coulèrent des yeux, & il fut obligé de
prendre fon mouchoir pour les efluyer.
La douleur d'Abou HaiTan, & les larmes du
calife attirèrent celles du grand - vifir Giafar
& des autres vifirs. Ils pleurèrent tous la mort
de Nouzhatoul - Aouadat , qui , de fon côté ,
étoit dans une grande impatience d'apprendre
comment Abou HalTan auroit réuffi.
Tiij
,