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36 2 DE NATURA RERUM, LIBER V<br />
Pellis item cecidit vestis contempta ferinae<br />
Quam reor invidia tali tunc esse repertam,<br />
Ut letum insidiis, qui gessit primus, obiret ;<br />
Et tamen inter eos distractam, sanguine multo<br />
142ODisperiisse, neque in fructum convertere quisse .<br />
Tunc igitur pelles, nunc aurum et purpura curis<br />
Exercent hominum vitam, belloque fatigant<br />
Quo magis in nobis (ut opinor culpa resedit.<br />
Frigus enim nudos sine pellibus excruciabat<br />
1425Terrigenas : at nos nil laedit veste carere<br />
Purpurea, atque auro, signisque ingentibus apta ;<br />
Dum plebeia tamen sit, quae defendere possit .<br />
Ergo hominum genus incassum, frustraque laborat,<br />
Semper et in curis consumit inanibus aevum ;<br />
14aONimirum, quia non cognovit quae sit habendi<br />
Finis, et omnino quoad crescat vera voluptas<br />
Idque minutatim vitam provexit in aetum<br />
Et belli magnos commovit funditus aestus .<br />
At vigiles mundi magnum versatile templum<br />
1~Sol et luna suo lustrantes lumine circum<br />
Perdocuere homines annorum tempora verti,<br />
Et certa ratione geri rem, atque ordine certo .<br />
Jam validis septi degebant turribus aevum,<br />
Et divisa colebatur discretaque tellus .<br />
144OTum mare velivolum florebat navibu' pandis ;<br />
Auxilia ac socios jam pacto foedere habebant,<br />
Carminibus cum res gestas coepere poetae<br />
Tradere : nec multo priu' sunt elementa reperta ;<br />
Propterea, quid sit prius actum respicere a tas<br />
1445Nostra nequit, nisi qua ratio vestigia monstrat .<br />
Navigia, atque agri culturas, moenia, leges,<br />
Arma, vias, vestes, et citera de genere horum,<br />
DE <strong>LA</strong> <strong>NATURE</strong>, LIVRE V 3 6 3<br />
n'en prit alors dans les forçts la race des fils de la terre .<br />
C'est que le bien que nous avons sous la main, tant quel41o<br />
nous n'en connaissons pas de plus doux, nous l'aimons<br />
entre tous, il est roi ; mais une nouvelle et meilleure découverte<br />
détr«ne les anciennes et renverse nos sentiments .<br />
Ainsi l'homme méprisa le gland, de mçme il renonùa aux<br />
couches d'herbe garnies de feuillage . Les vçtements faitsl418<br />
de peaux de bçtes un jour n'eurent plus de valeur : et<br />
pourtant leur découverte avait excité tant d'envie qu'un<br />
guet-apens mortel avait attiré, j'en suis sΠr, le premier<br />
qui les porta ; et cette dépouille disputée entre les meurtriers,<br />
toute sanglante, fut déchirée, et aucun d'eux ne142o<br />
put en jouir .<br />
Alors, c'étaient donc les peaux de bçtes, aujourd'hui<br />
c'est l'or et la pourpre qui préoccupent les hommes et les<br />
fait se battre entre eux : ah 1 c'est bien sur nous, je le<br />
pense, que retombe la faute . Car le froid torturait ces<br />
hommes nus, ces enfants de la terre, quand les peaux<br />
leur manquaient : mais pour nous, quelle souffrance est-ce1426<br />
donc de n'avoir pas un vçtement de pourpre et d'or<br />
rehaussé de riches broderies? Une étoffe plébéienne ne<br />
suffit-elle pas É nous protéger? Ainsi donc le genre humain<br />
se donne de la peine sans profit et toujours consume ses<br />
jours en vains soucis . Faut-il s'en étonner? il ne connaêtl~<br />
pas la borne légitime du désir, il ne sait les limites oû<br />
s'arrçte le véritable plaisir . VoilÉ ce qui peu É peu a jeté<br />
la vie humaine en pleine mer orageuse et déchaêné les<br />
pires orages de la guerre .<br />
Cependant ces astres vigilants, le soleil et la lune, dont<br />
la lumiàre parcourt la vaste et tournante voΠte du ciel,1485<br />
enseignàrent aux hommes la révolution annuelle des<br />
saisons et quel ordre immuable, selon quelles lois<br />
immuables, gouverne la nature .<br />
DéjÉ l'homme avait mis son existence É l'abri de tours<br />
solides, et déjÉ il cultivait une terre divisée et mise en<br />
partage. La mer était fleurie de navires dont le ventl44o<br />
gonflait les voiles ; des secours et des alliances déjÉ étaient<br />
assurés par traités, quand les poàtes confiàrent pour la