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[L'Assassin Royal 3]La nef du crépuscule

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frémissement. Très doucement, elle lui caressa le visage. « Vous<br />

êtes si maigre, si hâve », murmura-t-elle d’un ton compatissant.<br />

Elle trempa un morceau de tissu dans de l’eau tiède, puis lui<br />

lava le visage et les mains comme s’il s’agissait d’un enfant ;<br />

enfin, elle prit une couverture de mon lit et la lui plaça<br />

délicatement sur les épaules. Elle surprit mon expression ahurie<br />

et me foudroya <strong>du</strong> regard. « Va me chercher une cuvette d’eau,<br />

dégourdi ! » jeta-t-elle sèchement. Comme j’obéissais, elle<br />

s’accroupit devant Burrich, tira calmement ses ciseaux d’argent<br />

et découpa le pansement qui lui enveloppait la jambe jusqu’audessus<br />

<strong>du</strong> genou ; d’après son état, il n’avait pas été changé<br />

depuis le plongeon dans le fleuve. Alors que Brodette me<br />

prenait la cuvette des mains et s’agenouillait à côté d’elle,<br />

Patience ouvrit le pansement souillé comme elle l’eût fait d’une<br />

coquille.<br />

Burrich s’éveilla avec un gémissement et son menton<br />

retomba sur sa poitrine comme il ouvrait les yeux. L’espace d’un<br />

instant, il parut désorienté ; il me regarda qui me tenais debout<br />

auprès de lui, puis il aperçut les deux femmes accroupies devant<br />

sa jambe. « Quoi ? fit-il, incapable d’en dire davantage.<br />

ŕ C’est répugnant », déclara Patience ; elle le regarda<br />

comme s’il avait marché avec des bottes pleines de boue sur un<br />

sol propre. « Pourquoi ne l’avez-vous pas nettoyée, au moins ? »<br />

Burrich baissa les yeux sur sa jambe : <strong>du</strong> sang coagulé et <strong>du</strong><br />

limon formaient une croûte sur la longue plaie enflée qui lui<br />

descendait <strong>du</strong> genou. Cette vision lui fit manifestement horreur,<br />

et, quand il répondit à Patience, il avait la voix rauque et <strong>du</strong>re.<br />

« Quand Rousseau m’a emporté dans le fleuve, j’ai tout per<strong>du</strong> ;<br />

je n’avais plus ni bandages propres, ni vivres, ni rien. J’aurais<br />

pu découvrir la plaie, la laver, puis la laisser geler au vent.<br />

Croyez-vous qu’elle aurait été plus belle ?<br />

ŕ Voici à manger », intervins-je brusquement.<br />

Apparemment, le seul moyen d’empêcher ces deux-là de se<br />

disputer était d’empêcher qu’ils se parlent. Je poussai près de<br />

lui la petite table sur laquelle était posé un des plateaux de<br />

Mijote, et Patience s’écarta pour me laisser passer ; je remplis<br />

une chope de lait tiède et la plaçai entre les mains de Burrich,<br />

qui se mirent à trembler légèrement quand il porta le récipient à<br />

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