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[L'Assassin Royal 3]La nef du crépuscule

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J’entendis des bruits de pas ; maudissant mon imprudence,<br />

je me glissai derrière une tenture et me tins immobile. Un<br />

murmure de voix me parvint <strong>du</strong> salon : Murfès et, d’après le ton<br />

moqueur, le fou. Je me faufilai hors de ma cachette pour jeter<br />

un coup d’œil par le rideau qui me séparait d’eux. Kettricken<br />

était assise sur le divan à côté <strong>du</strong> roi et parlait avec lui à voix<br />

basse ; elle paraissait lasse : des cernes noirs soulignaient ses<br />

yeux, mais elle souriait au roi, et je me réjouis d’entendre Subtil<br />

chuchoter une réponse à ce qu’elle lui avait dit. Murfès était<br />

accroupi devant la cheminée, occupé à placer des bûchettes sur<br />

le feu avec une minutie excessive ; non loin de lui, Romarin était<br />

affalée par terre, sa nouvelle robe toute froissée autour d’elle ; je<br />

la vis bâiller d’un air épuisé, puis pousser un soupir et se<br />

redresser. Elle me fit pitié : la longue cérémonie m’avait fait<br />

exactement le même effet. Le fou se tenait derrière le fauteuil <strong>du</strong><br />

roi ; il tourna soudain la tête, fixa son regard droit sur moi<br />

comme si le rideau n’avait aucune matérialité pour lui et je ne<br />

vis plus que lui.<br />

Il se retourna brusquement vers Murfès. « C’est ça, souffle,<br />

sire Murfès, souffle bien chaud ; peut-être n’aurons-nous pas<br />

besoin de rallumer le feu, avec la chaleur de ton haleine pour<br />

chasser le froid de la pièce. »<br />

Toujours accroupi, Murfès le foudroya <strong>du</strong> regard pardessus<br />

son épaule. « Apporte-moi <strong>du</strong> bois, veux-tu ? <strong>La</strong> flamme<br />

court le long des brindilles, mais rien ne prend ; il me faut de<br />

l’eau chaude pour préparer sa tisane soporifique au roi.<br />

ŕ Tu veux que je bûche pour toi ? Que je bûche ? De bois je<br />

ne suis pas, beau Murfès, et point ne brûlerai-je, si près que tu<br />

t’enfles et souffles sur moi. Gardes ! Holà, gardes ! Venez bûcher<br />

un peu ! Apportez <strong>du</strong> bois ! » D’un bond, le fou quitta sa place<br />

derrière le roi et se dirigea en cabriolant vers la porte, où il<br />

traita le rideau comme s’il fût en chêne massif ; enfin, il passa la<br />

tête dans le couloir, appela les gardes à cris vigoureux, puis<br />

rentra la tête et revint avec la mine déconfite. « Pas de gardes,<br />

pas de bûches : pauvre Murfès ! » D’un air grave, il observa<br />

l’intéressé qui, à quatre pattes, tisonnait le feu à coups rageurs.<br />

« Peut-être que si tu te tournais de poupe en proue et soufflais<br />

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