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Au Bonheur des Dames Emile ZOLA - livrefrance.com

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d'un coup, le domestique entra avec deux lampes, et le charme fut rompu. Le salons'éveilla, clair et gai. Mme Marty replaçait les dentelles au fond de son petit sac ; Mmede Boves mangeait encore un baba, pendant qu'Henriette, qui s'était levée, causait àdemi-voix avec le baron, dans l'embrasure d'une fenêtre.- Il est charmant, dit le baron.- N'est-ce pas ? laissa-t-elle échapper, dans un cri involontaire de femme amoureuse.Il sourit, il la regarda avec une indulgence paternelle.C'était la première fois qu'il la sentait conquise à ce point ; et, trop supérieur pour ensouffrir, il éprouvait seulement une <strong>com</strong>passion, à la voir aux mains de ce gaillard sitendre et si parfaitement froid. Alors, il crut devoir la prévenir, il murmura sur un tonde plaisanterie :- Prenez garde, ma chère, il vous mangera toutes.Une flamme de jalousie éclaira les beaux yeux d'Henriette.Elle devinait sans doute que Mouret s'était simplement servi d'elle pour se rapprocherdu baron. Et elle jurait de le rendre fou de tendresse, lui dont l'amour d'homme presséavait le charme facile d'une chanson jetée à tous les vents.- Oh ! répondit-elle, en affectant de plaisanter à son tour, c'est toujours l'agneau quifinit par manger le loup. Alors, très intéressé, le baron l'encouragea d'un signe de tête.Elle était peut-être la femme qui devait venir et qui vengerait les autres.Lorsque Mouret, après avoir répété à Vallagnosc qu'il voulait lui montrer sa machineen branle, se fut approché pour dire adieu, le baron le retint dans l'embrasure de lafenêtre, en face du jardin noir de ténèbres. Il cédait enfin à la séduction, la foi lui étaitvenue, en le voyant au milieu de ces dames. Tous deux causèrent un instant à voixbasse. Puis, le banquier déclara :- Eh bien ! j'examinerai l'affaire... Elle est conclue, si votre vente de lundi prendl'importance que vous dites.Ils se serrèrent la main, et Mouret, l'air ravi, se retira, car il dînait mal, quand il n'allaitpas, le soir, jeter un coup d'oeil sur la recette du <strong>Bonheur</strong> <strong>des</strong> <strong>Dames</strong>.IVCe lundi-là, le 10 Octobre , Un Clair Soleil de Victoire perça les nuées grises, quidepuis une semaine assombrissaient Paris. Toute la nuit encore, il avait bruiné, unepoussière d'eau dont l'humidité salissait les rues ; mais, au petit jour, sous leshaleines vives qui emportaient les nuages, les trottoirs s'étaient essuyés ; et le cielbleu avait une gaieté limpide de printemps.<strong>Au</strong>ssi, le <strong>Bonheur</strong> <strong>des</strong> <strong>Dames</strong>, dès huit heures, flambait-il aux rayons de ce clair soleil,dans la gloire de sa grande mise en vente <strong>des</strong> nouveautés d'hiver. Des drapeauxflottaient à la porte, <strong>des</strong> pièces de lainage battaient l'air frais du matin, animant laplace Gaillon d'un vacarme de fête foraine ; tandis que, sur les deux rues, les vitrinesdéveloppaient <strong>des</strong> symphonies d'étalages, dont la netteté <strong>des</strong> glaces avivait encore lestons éclatants. C'était <strong>com</strong>me une débauche de couleurs, une joie de la rue qui crevait46

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