RDT - Numéro spécial concernant la révision - VBK-CAT

ZVW 5/2003
Stettler, La sauvegarde des intérêts des incapables
III. La protection fondée sur les mesures personnelles anticipées
1. Le mandat pour cause d’inaptitude
Le mandat pour cause d’inaptitude offre la possibilité de désigner par avance
une ou plusieurs personnes physiques ou morales dont le pouvoir de représentation
ne prendra effet qu’au jour ou le mandant sera frappé d’un état d’incapacité.
La question de l’introduction éventuelle dans l’éventail des instruments de la
protection de l’adulte d’une telle institution doit être distinguée de celle qui
porte sur le point de savoir s’il est possible ou non de délivrer à un représentant
ou à un mandataire une procuration qui l’autorise à poursuivre une action déjà
en cours, au-delà de la survenance de l’état d’incapacité du représenté ou du
mandant; cette dernière hypothèse sera brièvement évoquée dans un second
temps.
En permettant à toute personne ayant l’exercice des droits civils de désigner
un ou plusieurs tiers pour assurer la sauvegarde de ses intérêts et la représenter
dans ses rapports juridiques avec autrui au cas où elle deviendrait incapable de
discernement, le législateur contribuerait à valoriser la relation de proximité
aussi bien dans sa dimension sociologique que sur le plan juridique. Le «mandat
donné en prévision de l’inaptitude du mandant», tel que le connaît le droit québécois,
peut se matérialiser, alternativement ou cumulativement, dans le droit de
fournir une assistance personnelle, le pouvoir d’assurer l’administration des
biens, ou encore la responsabilité de souscrire ou de s’opposer à un traitement
médical, une attention particulière étant portée aux soins dispensés en fin de vie.
L’institution du mandat pour cause d’inaptitude ne peut guère se concevoir en
tant que mesure civile de protection de l’adulte sans qu’elle ne soit entourée d’un
certain formalisme, afin de réduire, dans toute la mesure du possible, les risques
d’abus. C’est ainsi que la déclaration de volonté du mandant ne saurait produire
des effets que si elle a été reçue en la forme authentique ou enregistrée dans un
procès-verbal établi par un office approprié désigné par le canton. Il est par
ailleurs difficile de concevoir un tel enregistrement sans vérification de l’identité
et de la capacité de discernement du mandant. Il conviendrait aussi de s’assurer
qu’il connaît les effets de la déclaration et qu’il exprime librement sa volonté. La
procédure pourrait toutefois conserver un caractère plus souple pour le mandat
limité au domaine médical; la désignation de la personne habilitée à consentir ou
à s’opposer à un traitement devrait cependant être subordonnée à l’exigence de
la forme écrite.
Il est bien entendu exclu qu’une telle déclaration puisse entraîner pour le mandataire
une obligation d’accepter la mission qui lui est confiée. D’autre part, les
effets de la manifestation de volonté, renouvelable et révocable en tout temps, ne
pourraient s’étendre que sur un espace temporel relativement limité, par ex. cinq
ou dix ans, en raison de la nécessité d’adapter le contenu à l’évolution des circonstances.
Le secret serait garanti par le service central de l’enregistrement dont
la désignation pourrait être confiée au Conseil fédéral.
262
© Schulthess Juristische Medien AG, Zürich · Basel · Genf 2003