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IMAGES ET CONNAISSANCE DE LA LICORNE - Bruno Faidutti

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«A cette vérité ne nuisent point les fourbes et les tromperies dont les<br />

imposteurs se servent à falsifier ces cornes de licorne, en prenant de l’ivoire, ou<br />

des cornes, ou même des os d’éléphant ou d’autres animaux gardés longtemps<br />

sous terre, où ils acquièrent plus de solidité et quelque transparence par le moyen<br />

du sel de la terre lequel s’y insinue comme il arrive à la porcelaine, que l’on y tient<br />

pour ce sujet un siècle entier, ni ce qu’il y a d’autres corps naturels ou artificiels qui<br />

bouillent dans l’eau, et même quelques pierres qui suent à l’approche du venin, ce<br />

qui procède de ce que le venin épaissit l’air qui s’attache au corps prochain qui est<br />

solide. La couleur n’y fait rien pareillement, vu que la suite des années l’a pu<br />

altérer. Joint que les anciens n’ont attribué cette noirceur qu’à la corne de l’âne<br />

indien et à celle du rhinocéros 113 . Et quant à l’odeur qui se trouve en la corne de<br />

licorne qui est en Suisse, c’est un indice qu’elle est falsifiée, ou du genre des<br />

minérales, la composition des cornes étant trop ferme ou trop solide pour rien<br />

évaporer, et ceux qui les ont distillées par le feu ayant appris qu’elles abondent en<br />

un sel qui n’a point d’odeur, et en un soufre puant. Aussi doivent être les<br />

excréments de cet animal, comme est son poil et sa corne, de mauvaise odeur, si<br />

ce qu’on nous allègue est véritable qu’il s’apprivoise par les bonnes odeurs 114<br />

puisqu’il ne peut aimer les bonnes qu’en chassant les mauvaises dehors.»<br />

On ne s’étonnera ni de voir ce discours très «traditionaliste» se terminer par<br />

un appel aux sommités religieuses et médicales, ni de constater que l’autorité y<br />

passe avant la raison, et cette dernière avant l’expérience: «Bref il n’est pas<br />

croyable que Clément septième, Paul troisième et plusieurs autres eussent pris cet<br />

animal pour leurs armes s’il n’eut point été, et les papes ne manquent point tant<br />

d’hommes entendus que Jules troisième en eut acheté un fragment douze mille<br />

écus, duquel son médecin s’est servi utilement à la guérison des maladies qui<br />

avaient quelque chose de vénéneux. Car Marsile Ficin 115 , Brassavole, Mathiole 116 ,<br />

Aloysius Mundela et plusieurs autres médecins les recommandent à ces maladies<br />

113 Le monocéros de Pline, tout comme le Cartazon d’Élien, ont effectivement une<br />

corne noire. L’âne des Indes de Ctésias a une corne tricolore, et Aristote ne dit rien<br />

de la couleur de celle de son oryx unicorne.<br />

114 cf. Conrad Gesner, Historia Animalium, de Quadrupedibus Viviparis, Francfort,<br />

1603 (1551), p.692 et Laurent Catelan, Histoire de la nature, chasse, vertus,<br />

proprietez et usages de la lycorne, Montpellier, 1624, p.18. Voir aussi supra, t.I,<br />

p.47.<br />

115 Marsile Ficin, Antidote des maladies pestilentielles, trad. I. Constans, Cahors,<br />

1595, pp.24, 28.<br />

116 Je n’ai pas trouvé de référence à la licorne dans les œuvres de P.A. Mattioli, qui<br />

fait pourtant grand cas de la corne de cerf.<br />

-182-

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