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IMAGES ET CONNAISSANCE DE LA LICORNE - Bruno Faidutti

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n’existe pas. Une certaine prudence restait donc de mise quant à la réalité des<br />

animaux unicornes décrits par les auteurs classiques, mais ce serait encore dans<br />

des notes sous le texte de Pline que le baron Cuvier nierait formellement l’existence<br />

de la licorne, une première fois, en latin, en 1827, une seconde, en français, en<br />

1831 45 .<br />

Le retour de la licorne<br />

La licorne fut plus à l’aise dans les clairs-obscurs du romantisme que dans la<br />

trop grande clarté des Lumières. Pendant un siècle environ, de 1780 aux dernières<br />

années du XIXème siècle, curieux et savants s’intéressèrent de nouveau à elle,<br />

certains d’entre eux la tenant pour un animal réel. Au premier abord, le débat<br />

semble une résurgence des controverses qui opposaient, sur le même sujet, les<br />

lettrés des XVIème et XVIIème siècle. Pourtant, les protagonistes, leurs arguments,<br />

leurs motivations aussi, avaient changé. Ainsi, la licorne n’appartenait plus au<br />

domaine de la médecine mais bien à celui de la zoologie, dont le corpus de savoirs<br />

et de théories était maintenant clairement distinct de celui des sciences médicales.<br />

Le débat sur l’existence d’un quadrupède unicorne distinct du rhinocéros avait<br />

également perdu tout sens ou enjeu religieux, les erreurs de traduction de la<br />

Vulgate étant désormais connues et admises, même par les hommes d’église 46 .<br />

Médecins et théologiens ne se préoccupaient donc plus d’un sujet devenu étranger,<br />

qu’ils laissaient aux zoologues, aux voyageurs, et aux géographes, successeurs des<br />

cosmographes. Témoin a contrario de la nature, désormais froidement scientifique,<br />

du débat sur l’existence de la licorne, le romancier allemand Jean-Paul s’indignait,<br />

en 1795, des «forçats des constructions hydrauliques et des cuvelages de mine de<br />

la philosophie critique, [qui] supputent l’existence de Dieu avec un sang et un cœur<br />

aussi froids que s’il s’agissait de l’existence du kraken ou de la licorne 47 ».<br />

connus, et spécialement la grande défense du narwhal, ou des ivoires tournées.»<br />

45 Voir infra, p.154<br />

46 Sur le renoncement de l’église à construire la zoologie à partir des textes<br />

sacrés, voir la thèse d’Éric Baratay, L’Église et l’animal du XVIIème siècle à nos<br />

jours, Paris, Cerf, 1996,ainsi que son article “Zoologie et église catholique dans la<br />

France du XVIIIème siècle (1670-1840): une science au service de Dieu” dans la<br />

Revue d’histoire des sciences, t.XLVIII-3, 1995, pp.241-265.<br />

47 Jean-Paul, Siebenkäs, Paris, Aubier, 1960, p.449.<br />

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