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IMAGES ET CONNAISSANCE DE LA LICORNE - Bruno Faidutti

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1680, obligeant à recourir à des manœuvres d’approche plus subtiles. C’est en vain<br />

que l’on cherche la trace de l’animal dans les tables des revues savantes. La<br />

blanche licorne ne semble plus apparaître que dans les dictionnaires, qui ne lui<br />

accordent que quelques lignes, écrasées entre deux synonymes, licol et licou. Une<br />

consultation systématique des nombreuses éditions et traductions de Pline et<br />

d’Aristote nous en apprend cependant un peu plus sur ce que les lettrés pensaient<br />

alors de l’animal. En effet, le passage de l’Histoire des animaux (livre 2, chapitre 1)<br />

dans lequel Aristote parle de l’âne indien et de l’oryx unicorne, et celui de l’Histoire<br />

naturelle (livre 8, chapitre 31) où Pline décrit le monoceros, furent parfois le<br />

prétexte de notes permettant au traducteur, où à un spécialiste consulté pour<br />

l’occasion, de donner son opinion sur la nature de l’animal décrit par l’auteur, et<br />

incidemment sur la réalité de la licorne. C’est dans ces textes de quelques lignes<br />

que perdura, sans enjeu et sans passion, le débat qui avait entraîné les plus grands<br />

esprits des deux siècles précédents dans l’écriture d’ouvrages aussi savants que<br />

volumineux.<br />

Jusqu’alors, les rares notes insérées en marge des passages où les auteurs<br />

classiques décrivaient des animaux unicornes se contentaient de renvoyer le<br />

lecteur à d’autres auteurs, tout aussi classiques. Les commentateurs de Pline<br />

citaient Aristote, ceux d’Aristote citaient Pline, les plus érudits allaient chercher des<br />

textes moins connus, comme l’Histoire des animaux d’Élien de Préneste 40 . Dans<br />

l’une des premières éditions de Pline en français, publiée en 1562, le traducteur n’a<br />

pas inséré de note particulière sur le monoceros, qu’il a traduit sans hésitation par<br />

licorne, se contentant d’indiquer dans la marge que «cette région est voisine de la<br />

Guinée 41 ».<br />

Les éditions du XVIIème siècle et du début du XVIIIème siècle ne sont guère<br />

annotées, et ne nous apprennent donc rien de neuf sur la licorne. Mais en 1771,<br />

dans une nouvelle traduction de l’Histoire naturelle, nous trouvons un long<br />

commentaire qui, pour la première fois, ne cite aucun auteur grec ou romain, mais<br />

discute, se fondant sur des sources plus récentes, de «la réalité ou la non-existence<br />

40 cf. par exemple Stephanus Aquæus, In omnes C. Plinii Secundi Naturalis<br />

Historiæ Argutissimi, Paris, 1530, fol.106. L’auteur de cette longue exégèse de<br />

Pline renvoie également à la vie d’Apollonius de Thyane de Philostrate, dans<br />

laquelle on peut lire que vivent en Inde des ânes cornus dont la corne est utilisée<br />

pour confectionner des gobelets qui neutralisent le poison.<br />

41 L’Histoire du monde de Pline second mis en français par Antoine du Pinet, Paris,<br />

1562, p.308.<br />

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