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IMAGES ET CONNAISSANCE DE LA LICORNE - Bruno Faidutti

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licorne «au temps de pestilence», mais «n’y trouva oncques effet louable 23 ». Le<br />

montpelliérain Guillaume Rondelet, quant à lui, écrit «je ne suis point ignorant que<br />

ceux qui tiennent telles cornes pour leur profit, ne donnent à entendre au peuple<br />

qu’icelles ont grandes et inestimables vertus par antipathie de chasser les serpents<br />

et les vers, et de résister aux venins. Mais je crois que la corne de licorne n’a point<br />

plus grande efficace, ni force plus assurée, que la corne de cerf, ou que l’ivoire 24 ».<br />

La prétendue panacée n’a, selon Jean Duret «aucune vertu contre les venins». le<br />

chirurgien nous conte ensuite une petite histoire montrant «quelle opinion feu<br />

monsieur Chappelain, premier médecin du roi Charles IX, avait de la licorne»:<br />

«Un jour, lui parlant du grand abus qui se commettait en usant de la corne<br />

de licorne, je le priai (vu l’autorité qu’il avait à l’endroit de la personne du roi notre<br />

maître pour son grand savoir et expérience) d’en vouloir ôter l’usage, et<br />

principalement d’abolir cette coutume qu’on avait de laisser tremper un morceau<br />

de licorne dans la coupe où le roi buvait, craignant le poison. Il me fit réponse que<br />

quant à lui, véritablement il ne connaissait aucune vertu en la corne de licorne,<br />

mais qu’il voyait l’opinion qu’on avait d’icelle être tant invétérée et enracinée au<br />

cerveau des princes et du peuple, qu’ores qu’il l’eut volontiers ôtée, il croyait bien<br />

que par raison n’en pourrait être maître. Joint, disait-il, que si cette superstition ne<br />

profite, pour le moins elle ne nuit point, sinon à la bourse de ceux qui l’achètent<br />

beaucoup plus qu’au poids de l’or… Lors je lui répliquai que pour le moins il en<br />

voulut donc écrire, afin d’effacer la fausse opinion de la vertu qu’on croyait être en<br />

icelle. A quoi il répondit que tout homme qui entreprend d’écrire de chose<br />

d’importance, et notamment de refuser quelque opinion reçue de longtemps,<br />

ressemble au hibou ou chat-huant, lequel se montrant en quelque lieu éminent, se<br />

23 D.L., ch.XVI, fol.34-35, d'après Christofle Landré, Œccoïatrie, Paris, 1573,<br />

pp.899-900: «Nos modernes docteurs font un grand cas de la corne d’une bête,<br />

nommée Monoceros, que nous appelons vulgairement licorne. Car, comme ils<br />

disent, elle garantit du venin, tant prise par le dedans que appliquée par le dehors.<br />

Ils ordonnent contrepoison contre la peste, voire désiacrée au corps de l’homme. Et<br />

pour bref parler, ils en font comme un alexitère et garantissement de tous maux.<br />

Toutefois étant studieux de si grandes propriétés, lesquelles ils attribuent à la dite<br />

licorne, l’ai bien voulu expérimenter en plus de dix, au temps de pestilence, mais<br />

n’en trouvait oncques effet louable, et plutôt me reposerai sur la corne de cerf, ou<br />

de chèvre, que sur celle de licorne, car elles ont une force commune d’absterger et<br />

mondifier. Tellement que par l’autorité des anciens elles sont adaptées à blanchir<br />

les dents, à resserrer les gencives flétries et molles. Davantage lesdites cornes<br />

brûlées et données à boire apportent merveilleux réconfort à ceux qui sont<br />

tourmentés de flux dysenterie et de cruente execration.»<br />

24 D.L., ch.XVI, fol.34. Je n'ai pas retrouvé dans les œuvres de Rondelet la source<br />

de Paré.<br />

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