Terre di mezzo: la Basilicata tra costruzione regionale e proiezioni ...

Aperitivo geografico
développement ou développement, migrations...). J’ai mis beaucoup plus
longtemps à connaître l’homme, parce qu’il est plus facile de connaître une
oeuvre que la personnalité complexe évolutive qui l’a produite, mais aussi parce
que B. Kayser était un homme réservé, discret, « qui n’affichait pas ses
médailles » et fuyait le tapage médiatique. C’est lors d’une semaine en avril 1996
en Lucanie où je l’accompagnais que j’ai eu quelques évocations de son passé
directement ou lors des discussions qu’il eut avec son grand et vieil ami de
Tricarico, Rocco Mazzarone. Mais c’est seulement après sa mort, au cours de
l’hommage qui lui fut rendu à Toulouse en 2002, que j’en ai appris beaucoup
plus sur son passé de jeune résistant, de combattant, ses engagements militants ...
Pour en rester à notre question, celles des rapports de B. Kayser avec la
Basilicate, j’ai eu le sentiment de leur importance lors de la grande excursion
universitaire que B. Kayser a dirigée en 1972, sentiment confirmé ensuite lors des
multiples séjours que j’ai faits dans cette région. Ces rapports de B. Kayser avec
la Basilicate ont donc joué un rôle très important dans la formation et
l’affirmation du géographe Kayser. Ce fut une rencontre très fructueuse,
réciproquement, je crois entre la trajectoire d’un homme et d’autres hommes,
d’une région, dans une conjoncture historique et régionale très particulière et très
favorable.
Tout a commencé par le choix d’une question et d’un terrain pour sa thèse
complémentaire. P. Birot distribuait des sujets de géographie physique de la
Méditerranée, mais je fais l’hypothèse que, dans ce cadre, le choix de la Lucanie
a correspondu au voeu de B. Kayser (et pas seulement pour des considérations
pédologiques) qui avait dû avoir, sinon déjà rencontré C. Levi, du moins lu « Le
Christ... ».
C’est alors un jeune géographe de 30 ans, mais dont certains ont pesé lourd.
Il est le fils d’un haut dirigeant du parti radical, le parti pivot de la vie
politique d’avant-guerre, un membre de la bourgeoisie intellectuelle parisienne,
neveu du Capitaine Dreyfus. Mais son destin est bouleversé par la guerre.
Réfugié dans le sud-ouest, il y rencontre le monde rural, paysan, et Renée son
épouse. Sans doute faut-il voir là la raison de son intérêt (jamais démenti, voire
croissant avec le temps) pour les études rurales (dans tous leurs aspects) et aussi
de son ancrage à la périphérie de Toulouse. A la Libération, le jeune résistant et
militant continue le combat et prend part à la dure campagne militaire 1944-
1945.
Je ne savais pas grand-chose de cette partie de sa vie avant d’entendre le
témoignage d’un de ses condisciples lors de la journée du 6/12/2002, car
Bernard Kayser n’était pas homme à étaler ses faits d’armes.
Après la capitulation allemande, revenu à la vie civile, il réussit rapidement
et brillamment ses études supérieures en géographie. Avec l’agrégation, il est
nommé au lycée de Cannes, puis entre au Cnrs. Il mène à bien une thèse
principale Campagnes et villes de la Côte d’Azur (1960) et dans la foulée sa thèse
complémentaire qui l’entraîne en Lucanie (1957-1958). c’est une nouvelle grande
208