Le Parfum D'Adam

visible dans le lointain. Les propriétés, du côté de la mer,
avaient, plus nettement encore que de la route, l’air de
jardins. Malgré l’habileté des paysagistes, on pouvait
remarquer une certaine régularité dans la plantation des
essences, qui trahissait l’intervention humaine.
On comprenait que le choléra n’avait aucun moyen de
s’introduire dans un tel bastion de luxe, à moins d’y avoir
été amené volontairement. Deux hypothèses s’imposaient
à l’esprit pour expliquer cette contamination et elles étaient
toutes les deux localisables depuis le point où se tenait
Paul.
La première était l’infestation du village des
domestiques. En effet, à l’arrière de la crête, caché à la
vue de la route et des villes, s’étendait un petit
rassemblement de cases. Il devait s’agir des maisons de
serviteurs. Les familles des nombreux membres du
personnel qui entretenaient les villas devaient vivre dans
cette annexe indigène. Il se pouvait que la contamination
ait eu lieu par là. Vu de loin – Paul n’avait pas le temps d’y
descendre –, le hameau semblait très pauvre et ses
baraques couvertes de tôles étaient construites en torchis.
Cette première hypothèse était toutefois contredite par une
observation du rapport. Les épidémiologistes avaient noté
que tous les cas observés concernaient des personnes
travaillant dans les propriétés et presque aucun les
habitants du village de cases. Il fallait donc plutôt en
conclure que le contact avec le vibrion s’était fait dans les
demeures de luxe et non dans la promiscuité du hameau.