Le Parfum D'Adam

qui faisait le commerce des engrais. Il y avait une demande
énorme pour les produits agricoles à cette époque. J’ai
tout de suite vu ce qu’on pouvait faire avec une entreprise
comme celle-là. Mais le vieux Costa s’en moquait. Il n’avait
aucune ambition et passait ses journées à boire de l’ouzo.
C’est moi qui ai rapidement pris les commandes de la
maison. Après, il y a eu cet incident pénible… Il fallait bien
en passer par là. Je vois ce que vous pensez. Eh bien, non,
je ne l’ai pas tué. Mais il est certain que je n’ai rien fait non
plus pour le sauver. Les médecins lui avaient interdit la
boisson. En lui en apportant chaque jour, je contribuais à
son bonheur et à sa perte. Ai-je réalisé sa volonté ou la
mienne ? Les deux, sans doute. En tout cas, je lui ai fait
signer un acte de donation et il est mort. Ce sont des
souvenirs lointains et je préfère les oublier.
Ensuite, tout est allé vite et bien. J’avais ce qui m’avait
toujours manqué : un marchepied, un tremplin pour
m’élever plus haut. Cela me suffisait. Pour connaître les
étapes de mon succès commercial, il suffit de lire ma
biographie, ce que vous avez sans doute déjà fait. Cela n’a
pas d’intérêt.
Seulement, voilà : on n’est pas fils de pasteur pour rien.
Plus haut on monte, plus on se rapproche de Celui qui
gouverne toutes choses. Plus on sent Son regard sur vous,
plus on redoute Son jugement. Je n’étais plus pauvre.
J’étais même définitivement à l’abri de tout besoin. J’avais
des maisons, des forêts, des voitures, un yacht. J’étais
devenu citoyen américain et je me suis demandé comment