Le Parfum D'Adam

Les autorités françaises ont tout organisé pour me
rapatrier discrètement. C’est seulement la veille de mon
embarquement pour Paris que j’ai pris la décision de ne
pas partir.
Avec les interrogatoires et le traitement à l’hôpital,
j’avais surtout pensé au passé, et je n’avais pas vraiment
pris le temps de regarder autour de moi. Et tout à coup, au
moment de quitter le Brésil, je me suis mise à le voir, à le
sentir. Vous pouvez considérer que c’est encore une de
mes idées bizarres, mais je suis ainsi faite. La réalité ne
m’apparaît souvent que par le détour du rêve. C’est en
rêvant à Joaquim, à ma nuit dans la Baixada et même
simplement à la terrasse de l’hôtel Laranjeiras où je
regardais tomber la pluie chaude, que j’ai pris soudain
conscience que tout cela était encore là, autour de moi, et
que je n’avais pas envie de quitter ce pays.
Les diplomates étaient contrariés, bien sûr. Mais ce sont
des gens habitués à se conformer à la volonté de gens
qu’ils ne comprennent pas. Ils ont accepté d’annuler mon
rapatriement et même d’obtenir pour moi un visa de séjour
brésilien avant de me rendre mon passeport. Par faveur
spéciale, j’ai même pu disposer de quelques fonds,
laissés à leur discrétion pour venir en aide aux touristes qui
se sont fait dévaliser. Et voilà comment je me suis
retrouvée ici. Je suis allée voir Joaquim et il m’a déniché
un petit appartement dans un immeuble proche de chez lui.
J’aurais accepté de vivre dans la favela, mais il s’y est
catégoriquement opposé. Vous ne le connaissez pas mais