Le Parfum D'Adam

Il saisit le cliché du séminaire devant lui et pointa le doigt
sur un homme jeune, debout à l’extrémité gauche du
groupe. Il souriait dans le vague, avec un air doux, absent,
inquiétant toutefois car il semblait appartenir tout entier à
un monde de rêves et de chimères.
— Allistair McLeod, annonça Alexander. Un destin
exceptionnel. Au départ, pourtant, c’est un jeune Écossais
assez banal. Il naît dans une famille ouvrière de Glasgow.
Le père est pasteur épiscopalien. Allistair est le huitième
enfant d’une fratrie de douze. Excellent élève, il bénéficie
d’une bourse royale et va étudier l’agronomie à
Manchester puis à Oxford. Toujours avec des bourses, il se
fait envoyer en Allemagne pour des stages. On ne sait pas
très bien comment il se retrouve chez Fritsch. McLeod est
si pauvre que notre généreux professeur l’accepte sans
frais d’inscription. Sur les listes de notes, son nom figure à
part, comme s’il était une sorte d’auditeur libre.
La diction monotone d’Alexander avait fait retomber
l’enthousiasme. Le soleil avait tourné et un gros nuage
emplissait la pièce de pénombre. L’exposé prenait des
allures d’épitaphe pour une action défunte.
— Je t’en prie, Alexander, accouche ! pressa Kerry qui
tenait à sauver l’entreprise.
— Écoutez-moi tranquillement jusqu’au bout. Vous allez
voir : ça vaut la peine. En sortant de son année chez
Fritsch, McLeod, contre toute attente, ne rentre pas en
« Angleterre. Il part pour l’Afrique du Sud et disparaît
pendant près de dix ans. Sa biographie officielle affirme