Le Parfum D'Adam

sais, d’écouter les conversations qui ne vous sont pas
destinées. Mais voyez-vous, devant moi, personne ne se
gêne. Je suis comme un meuble, une plante. On m’oublie.
— Et que disent-ils ?
La pluie avait faibli. Les gouttes plus grosses qui
tombaient sur le sol venaient du feuillage qui s’égouttait.
— Mademoiselle Juliette, reprit Joaquim d’une voix plus
sourde, ils parlent de vous comme d’une ennemie.
— Qui donc ?
— Votre ami et tous ceux qui viennent le voir. Ce Zé-
Paulo, par exemple.
C’était une autre des bêtes noires de Joaquim et il
faisait siffler son nom comme un serpent.
— Je ne peux rien vous dire de précis. Il faudrait que
j’écoute mieux. Si vous voulez, je le ferai. Tout ce que je
sais, c’est qu’ils se méfient de vous. Qu’ils se donnent
mutuellement des consignes pour limiter les informations
dont vous disposez. « Il ne faut surtout pas qu’elle sache
ceci. » « Voilà ce que tu devras lui dire à propos de cela. »
Et puis, il y a des phrases que je ne comprends pas, mais
qui me semblent bien inquiétantes.
— Lesquelles, Joaquim ?
Un couple de perroquets s’ébroua dans le magnolia et fit
tomber au sol quelques plumes mêlées aux gouttes d’eau.
— Je ne m’en souviens pas mot à mot. Mais ils parlent
de vous comme si votre rôle allait bientôt prendre fin.