dédié au premier consul - Notes du mont Royal

SUR LA LOI DES DOUZE TABLES. 419
s'agit dans ce fragment que' de l'argent placé à intérêt, et
non du simple prêt à consomption, (i) mutuum, par lequel,
soit de l'argent, soit autre chose qui consiste en poids (2),
mesure et nombre, est livré à quelqu'un, de manière que
(1) Le prêt à consomption ne s'appelle pas mutuum, de ce que la chose vous
est donnée ut ex meo tuumfiat, comme le pensent les jurisconsultes Caïus ',
Paul * , et même Justinien } , mais du mot Sicilien ucï-nt. Nous lisons dans
Varron * : Jï datur quod reddatur , mutuum ; quod Siculi fu'rm. Les Romains empruntèrent
des Siciliens la plupart des dénominations concernant la monnoie :
nous aurons incessamment occasion d'en citer un autre exemple.
(2) Les choses qui consistent en poids , nombre ou mesure, s'appellent resfungibiies,
c'est-à-dire, choses susceptibles de remplacement. On pesoit les choses
ui consistoient en poids , comme la cire, la poix , le lard, &c. On voit même
3
ans Varron J , qu'Hirrius prêta deux mille murènes à César, et qu'il les lui
donna au poids. Pline 6 et Macrobe 7 , qui rapportent ce même trait, parlent de
six mille murènes ; et le père Hardouin, d'après ces deux textes , corrige celui de
Varron.
On mettoit l'argent au nombre des choses susceptibles de remplacement. Anciennement,
on donnoit l'argent au poids : dans la suite, on ne pesa que l'airain en
masse, et on donna l'argent par compte. Les créanciers qui pretoient de l'argent,
ou comptoient de leur coffre cet argent, ou se servoient du ministère d'un changeur
ou banquier : celui qui de son coffre comptoit de l'argent, étoit dit, ex arcâ
veldomo numerasse; et pour sûreté de sa créance , il recevoit une cédule, ou obligation
par écrit, dont on trouvé dans la loi XL , au Digeste, de rébus creditis, une
formule conçue en ces termes : L. Titius scripsi, me accepisse à P. Mœvio quindecim
mutua, numérota mihi de domo ; et hœc quindecim proba rectè dari calendis
futuris, stipulatus est P. Mcevius; spopondi ego L. Titius. Si die supra scriptâ,
summa P. Matv'io , eive ad quem ea res pertinebit, data , soluta non sic , pœnœ nomine
in dies triginta, inque denarios centenos denarios singulos dari, stipulatus est
P. Mcevius : spopondi ego L. Titius; convenitque internos, utipro Morvio ex summâ
suprà scriptâ menstruos refundere debeam denarios tricenos ex omni summâ ei heredive
ejus. On aperçoit dans cette cédule, combien les créanciers usoient d'adresse
pour ne pas paroitre exiger de leurs débiteurs des intérêts, mais seulement une
peine si ces débiteurs ne payoient pas au jour marqué. Si le créancier se servoit
du ministère d'un banquier, il étoit dit, de mensâ numerasse, et on portoit la
somme sur un livre de compte. Donat, sur Térence 9 , indique très-distinctement
ces deux manières de prêter de l'argent. Térence fait dire a yEschinus : Ego ad
forum ibo , ut hune absolvam. Sur quoi Donat ajoute dans une note : Tune enim in
foro magis} quàm de mensœ script urâ, quàm ex arcâ domo que vel cistâ, pecunia numerabatur.
Saumaise '° prétend qu'il y avoit une grande différence entre ces deux
manières de prêter de l'argent, et ce commentateur disserte fort au long à ce sujet.
* Insiit. lib. II, tit. 9 , paragr. i.
7 'Loi II, $. 1, Digest. de rébus creditis,
* /» hstit. lib. m, tit. 14 , in princ. fine
Lib. II Saturnal. tapi i t.
* Varron, de UnguS Latinâ, lib. IV, in
; Pline , Nat. Hist. I. XXXIII, cap. j.
* De linguâ Latinâ, lib. IV, pag. 4».
i
De re rusiicâ, lib. lit, cap. IJ.
' In Adelphis, act. il, scen. 4, v. 1}.
'" De modo usurar. cap. 11, pag. 47} "
* Natural. Histor. lib. IX, cap. //. •"??•