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1 - Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc

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124 HESPÉRIS<br />

suivi par le tra<strong>du</strong>cteur italien de Léon, le groupe ga sert à rendre seulement les<br />

syllabes arabes ga et ga, mais non rJa qui est transcrit par gia (cf. Tangia < Tan­<br />

,rja li Tanger »). Il n'est cependant pas impossible d'admettre que l'absence de l'i<br />

provienne d'une faute d'impression initiale qui ne fut jamais corrigée par la suite.<br />

Si l'on admettait mon hypothèse, le prodo «preux» de la tra<strong>du</strong>ction italienne<br />

serait donc une erreur pour prato « pré; prairie» (1). Mais s'agit-il là, simplement,<br />

d'une double faute d'impression? Je serais assez porté à croire que l'erreur s'est<br />

pro<strong>du</strong>ite par l'intermédiaire de l'espagnol prado « pré». On sait que AI-Uasan ibn<br />

Mul;1ammad al-'Vazûin, alias Léon l'Africain, était né à Grenade, vers 1495, à une<br />

époque où le royaume na~ride<br />

était pressé de tous côtés par les Chrétiens et où<br />

ceux-ci exerçaient dans tous les domaines une grosse influence sur les derniers<br />

musulmans de la Péninsule. Beaucoup de Grenadins étaient bilingues et parlaient<br />

couramment l'espagnol; tel était le cas de Léon l'Africain, de qui la bibliothèque de<br />

l'Escorial conserve un vocabulaire arabe glosé en latin, en hébreu et en espagnol (2).<br />

C'était donc, selon toute vraisemblance, cette dernière langue qu'il employait dans<br />

ses rapports avec. les Européens; et ce serait à l'occasion d'une tra<strong>du</strong>ction de l'espagnol<br />

en italien que prado aurait donné prodo, au lieu de prato.<br />

Par ailleurs, la notice géographique qui, dans l'œuvre de Léon l'Africain, suit<br />

celle qu'il a consacrée à Sahb el-Mar,rja est relative à un Azgari Camat'en, « plaine<br />

qui est comme un pré, car l'herbe y <strong>du</strong>re toute l'année, même l'été». Pour Schefer<br />

(p. 366, n. 2), ce toponyme signifiait « Plaine des Ghoumara» : cette explication est<br />

aujourd'hui inadmissible. M. L. Massignon propose la restitution Azg'ar Ig'ommal'an<br />

«Plaine des Chasseurs », qui n'est guère satisfaisante~ mais la suggestion qui la<br />

suit: « doublet <strong>du</strong> nom précédent (?)) me paraît devoir être retenue. Il ne s'agit d'ailleurs<br />

plus de rapprocher « Plaine des Chasseurs» de « Plaine <strong>du</strong> Preux», mais bien<br />

« Plaine de la Prairie» d'un toponyme berbère qui serait composé d'azgar «plaine»<br />

et de igelnran ôu igmaren, pluriel de agmer « prairie», correspondant exact de<br />

l'arabe marza (3). Il resterait à rechercher sur place si le toponyme arabe et son<br />

synonyme berbère s'appliquent en réalité à deux plaines différentes ou à la même;<br />

ce point serait intéressant à fixer, car le résultat de l'enquête permettrait d'établir le<br />

degré de confiance que l'on peut avoir dans les renseignements géographiques fournis<br />

par Léon l'Africain.<br />

G. S. COLIN.<br />

(1) Au <strong>Maroc</strong>, le mot marZa désigne une prairie humide, située dans une dépression, verdoyante<br />

en été et plus ou moins marécageuse en hiver.<br />

(2) Il composa ce vocabulaire en Italie et l'acheva en 930 (1523-24), soit quatre ans après sa<br />

capture. (Cf. H. Derenbourg, Manuscrits Escurial, J, p. 410.)<br />

(3) Cf. Destaing, Voc. JI'. berb. Soûs, p. 229 : Prairie = agmer (terrain herbeux près des<br />

cours d'eau).

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