L'Etat en jeu - fasopo

personnalités de la « société civile ». Dans un communiqué, les Chambres d’ingénierie
mécanique et géologique dénoncent la nomination de Tan 1201 . Les personnels enseignants
d’autres universités apportent leur soutien à leurs confrères mobilisés, comme le font les
enseignants de l’Université d’Hacettepe et 150 enseignants du campus de Beytepe en publiant
une déclaration dans laquelle ils déclarent leur opposition à la nomination d’Hasan Tan.
On remarque ainsi que cette élection emblématique d’un sympathisant MHP au poste
de recteur de la plus prestigieuse université du pays fonctionne comme un événement
cristallisateur des intérêts de tout un ensemble d’usagers des institutions de l’éducation
nationale. Pour les enseignants, elle représente une menace nouvelle adressée par le
gouvernement désireux de contrôler le recrutement des personnels enseignants. Pour les
étudiants, il s’agit d’une tentative de reprise en main d’institutions encore épargnées par les
tactiques de pénétration mises en œuvre par le MHP. Quant aux employés des services
techniques d’ODTÜ, ils craignent – avec raison – de perdre leurs postes au profit d’un
personnel proche du nouveau recteur. Selon le président de l’ÖTK, pendant toute la période
de mobilisation contre la nomination de Tan, plusieurs éléments ont contribué à l’apparition
des mobilisations enseignantes et étudiantes :
« Mais pourquoi étaient-ils contre lui ?
Mais parce qu’on ne le connaissait pas. A ODTÜ on avait réussi à chasser les fascistes
après une journée de boycott. Dans les autres universités il y avait de la violence, des
attaques, des altercations. Pas à ODTÜ. Les éléments perturbateurs avaient été
renvoyés de l’école. C’est pour ça qu’à ODTÜ il n’y avait pas de problème dans le
mouvement étudiant. Il y avait des problèmes avec des gens qui venaient de
l’extérieur, mais avec Hasan Tan, il était clair qu’il allait user d’ingérence, intervenir
dans tout cela. Donc tous les enseignants étaient contre sa nomination. Tout le monde.
Tous les présidents de département ont démissionné. Tosun Terzioglu, le recteur
actuel de l’Université Sabancı, Yakup Kepenek, actuellement député CHP, tout le
monde a démissionné. Personne n’a voulu rester en poste. Seules trois personnes sont
restées en poste […] Les étudiants ont commencé à se mobiliser. Depuis un an ou
deux, il avait été question de sa nomination, et on s’était opposé en disant « Hasan Tan
ne peut pas être recteur ». Mais en 1977 ils le nomment recteur. Alors il y a eu un
boycott. D’ailleurs ce n’était pas un boycott, on ne l’a pas annoncé. Moi j’étais
président de ÖTK à cette époque et on a dit, on ne connaît pas Hasan Tan, on ne fera
rien d’officiel avec lui, aucune de nos actions ne doit avoir de caractère officiel. On
allait en cours, et dès qu’on sortait de salle, par exemple, on jouait des sketchs, on le
caricaturait… C'est-à-dire, tout le corps enseignant était contre Hasan Tan » 1202 .
1201 Ibid., p. 201.
1202 Entretien semi-directif, réalisé à Istanbul avec Ahmet (ODTÜ-ÖTK), le 2 juin 2007.
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