L'Etat en jeu - fasopo

l’entreprise et figure locale du Parti de la justice, licencie 18 ouvriers membres du nouveau
syndicat, puis les leaders du mouvement de résistance qui s’ensuit. Constatant que le
mouvement de grève ne cesse pas, il licencie 381 ouvriers syndicalisés. Il doit les réintégrer
quand la cour de justice invalide cette décision, mais s’adjoint les services d’une vingtaine
d’hommes en armes mis à disposition par le syndicat idéaliste, qu’il charge de maintenir
l’ordre dans l’usine. Un rapport à ce sujet, préparé par la direction de la police de
Kahramanmaraş le 25 septembre 1978 affirme alors que des groupes d’extrême droite, ainsi
que des individus originaires de villages de la province, employés comme ouvriers et recrutés
par la MİSK, s’emploient à provoquer les ouvriers de l’usine 1400 . Les actes de violence dirigés
contre les membres du nouveau syndicat se multiplient jusqu’à la fin de l’année 1978. Le
syndicat du textile est ainsi plusieurs fois attaqué par des groupes composés de membres de la
MİSK, de TEKSİF, du MHP, de Ülkü-Bir et de l’ÜGD.
Les événements de l’usine Pişkin renforcent les tensions entre d’un côté, les membres
des organisations d’extrême gauche et de la section CHP et de l’autre, ceux des organisations
idéalistes locales. Dès l’entrée en fonction du gouvernement CHP en janvier 1978, les actes
de violence à l’encontre de membres d’organisations proches du parti se multiplient. Le plus
souvent, il s’agit d’attaques à l’engin explosif. Des bombes explosent ainsi le 16 janvier 1978
devant la maison de İsmail Ünlü, le directeur de l’école d’arts (Sanat okulu) et le 19 janvier à
l’usine d’un membre connu du CHP local. Le 4 mars, la maison du procureur de la
République Celal Nuri est visée, le 14 mars, c’est la maison d’un enseignant de gauche, puis
le Akın Coffee House, un café alévi, qui explosent. Le 26 mars 1978, c’est le bureau de Tüm-
Tis (Türkiye Motorlu Taşıt İşçileri Sendikası, Syndicat des travailleurs des transports
motorisés de Turquie) qui est visé, puis les bureaux du CHP le 13 avril. Quand le dede alévi
Sabri Özkan est assassiné par des idéalistes le 3 avril 1978, un cortège de 5 000 personnes,
composée des membres de la communauté alévie de la ville, de militants et de sympathisants
des organisations d’extrême gauche et du CHP locaux, défile dans les rues de la ville en
scandant des slogans anti-fascistes, sans toutefois s’attaquer au bâtiment du MHP près duquel
il passe.
L’arrestation le 16 avril 1978 d’activistes idéalistes préparant une attaque à la bombe
permet de mettre à jour l’existence d’une organisation clandestine armée idéaliste, l’ETKO,
responsable des attaques à la bombe dans la ville. Le même jour, un agent de la poste meurt
1400 Erdost, Muzaffer İlhan, Faşizm ve Türkiye 1977-1980 (Fascisme et Turquie 1977-1980), Ankara, Nur
Yayınları, 1995, pp. 218 - 219.
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